Après plusieurs semaines de violences dans le Haut-Mbomou, dans le sud-est de la Centrafrique, un retour progressif à la normale s’observe à Obo, chef-lieu de la préfecture. Les mercenaires russes du groupe Wagner, venus en renfort après les affrontements d’avril et mai, ont quitté la ville et libéré l’école qu’ils occupaient. Ce retrait a permis la réouverture des marchés et la reprise de certaines activités quotidiennes, selon des témoignages recueillis par le Réseau des journalistes pour les Droits de l’Homme (RJDH).
Les tensions récentes trouvent leur origine dans une rupture entre les forces armées centrafricaines (FACA) et un groupe de miliciens de l’ethnie zandé, intégrés dans l’armée en 2023. Ces hommes, formés initialement par les Russes, se sont retournés contre leurs anciens alliés. Cette scission a donné lieu à une série d’attaques meurtrières contre les FACA et leurs partenaires russes, entraînant une réponse militaire rapide et musclée.
La région du Haut-Mbomou reste l’un des foyers les plus instables du pays. Frontalière du Sud-Soudan et de la RDC, elle a longtemps été livrée à elle-même. L’absence d’autorité étatique durable, la faiblesse des infrastructures, et la présence de groupes armés, comme la LRA dans le passé, ont fragilisé toute tentative de pacification. Le retour à une vie normale reste donc très fragile, malgré l’apparente accalmie observée à Obo.
Le 17 mai, le corps du sous-préfet de Djemah, enlevé trois jours plus tôt, a été retrouvé sans vie, relançant les craintes sur la sécurité des représentants de l’État. Un autre responsable local, Roger Tisso, premier adjoint au maire de Zemio, reste porté disparu après avoir été enlevé par des gendarmes le 11 mai. Ces actes, qualifiés de « barbares » par le ministre de la Communication, illustrent l’impunité qui règne encore dans la zone.
Parallèlement aux enlèvements, des purges ont été observées au sein des FACA. Une vingtaine de militaires d’origine zandé, dont Michel Koumboyeki, l’un de leurs porte-parole, ont été radiés. Certains sont soupçonnés d’avoir pris part aux attaques contre leurs propres troupes, ce qu’ils réfutent. D’autres soldats centrafricains ont été désarmés par les mercenaires russes après avoir refusé de partir en mission. À Obo, des civils ont remis volontairement leurs armes, redoutant d’être associés aux combattants dissidents.
La crise actuelle révèle une profonde méfiance entre les différentes composantes de l’armée, entre les forces étrangères et les populations locales. Pour beaucoup, le recours aux mercenaires russes, bien qu’efficace militairement, aggrave les tensions communautaires et sape les efforts d’intégration nationale. Tant que ces fractures ne seront pas résolues, le retour durable à la paix dans le sud-est centrafricain restera un objectif incertain.