À son arrivée à l’aéroport international de Bangui, le vendredi 3 octobre, Dominique Désiré Erenon, figure de l’opposition centrafricaine et président du parti Marche pour la Démocratie et le Salut du Peuple (MDSP), a été arrêté par les forces de sécurité. Exilé en France depuis 2022, cet ancien expert constitutionnaliste auprès de l’Union africaine avait décidé de rentrer au pays pour reprendre son poste d’enseignant en droit public à l’université de Bangui. Son interpellation, sans motif clairement annoncé, provoque une vive émotion au sein de la classe politique.
Selon ses proches, Erenon avait annoncé publiquement son intention de participer au débat politique national, estimant que « la démocratie ne peut être défendue depuis l’exil ». À peine débarqué, il a été conduit à l’Office central de répression du banditisme avant d’être transféré à la Section de recherche et d’investigation (SRI). Les autorités n’ont pour l’instant communiqué aucune explication officielle sur les raisons de son arrestation. D’après une source au sein de la SRI, sa garde à vue se déroulerait « sans incident » et l’opposant devrait être entendu par le procureur ce lundi 6 octobre.
Cette arrestation intervient dans un climat politique marqué par la répression croissante des voix dissidentes. En 2023, plusieurs responsables politiques et militants ont déjà été interpellés pour « atteinte à la sûreté de l’État » ou « désinformation ». Dominique Désiré Erenon s’était opposé avec virulence à la révision constitutionnelle de 2016, qui avait renforcé les pouvoirs du président Faustin-Archange Touadéra. En 2022, il avait affirmé avoir échappé à une tentative d’enlèvement avant de s’exiler en France. Son retour, perçu comme un acte de défi, semble avoir ravivé la méfiance des autorités.
Ni les charges retenues contre lui ni les circonstances exactes de son arrestation n’ont été officiellement précisées. Ses proches affirment qu’il n’a commis aucun délit et qu’il revenait dans un cadre strictement professionnel. Certains observateurs estiment que cette interpellation traduit la volonté du pouvoir de neutraliser toute opposition crédible à l’approche des prochaines échéances électorales. Le gouvernement, de son côté, garde le silence, alimentant les spéculations sur une possible instrumentalisation de la justice.
Les soutiens de l’opposant appellent à sa libération immédiate et dénoncent « une manœuvre politique visant à intimider l’opposition ». Des organisations de la société civile et des défenseurs des droits humains s’inquiètent d’un recul des libertés fondamentales dans le pays. Pour plusieurs analystes, cette arrestation met en lumière le dilemme persistant du pouvoir centrafricain : affirmer son autorité tout en préservant une image de légitimité démocratique face à la communauté internationale.