Le président de la transition guinéenne, le général Mamadi Doumbouya, a entamé une visite officielle de deux jours en Côte d’Ivoire. Accompagné de hauts responsables de son gouvernement, dont le ministre des Affaires étrangères et celui des Infrastructures, il a été accueilli par Alassane Ouattara dans un climat que les deux parties veulent désormais apaisé. Objectif affiché : renforcer la coopération bilatérale, notamment dans les domaines économiques et diplomatiques.
Au cours de cette visite, Mamadi Doumbouya a publiquement salué le soutien du président ivoirien, rappelant le rôle conciliant joué par Ouattara au sein de la CEDEAO à l’époque du putsch guinéen. Il a mis en avant « la compréhension plutôt que le jugement » affichée par son homologue ivoirien. La nomination récente d’un ambassadeur guinéen à Abidjan, avec la remise officielle des lettres de créance ce lundi, marque un tournant dans les relations entre les deux capitales, restées prudentes depuis la prise de pouvoir par les militaires en septembre 2021.
Depuis le renversement d’Alpha Condé, les relations diplomatiques entre Conakry et Abidjan avaient connu un net ralentissement. La Côte d’Ivoire, comme d’autres États de la région, avait maintenu une distance officielle vis-à-vis de la junte, sans toutefois adopter une position de rupture. Cette visite et les gestes protocolaires qui l’accompagnent viennent rompre une forme d’isolement diplomatique que la Guinée cherche désormais à dépasser, à mesure que la transition se prolonge.
Au-delà de la diplomatie, les deux dirigeants ont affiché leur volonté de redynamiser les échanges économiques. Les flux commerciaux entre les deux pays sont estimés à 100 milliards de francs CFA (environ 152 millions d’euros), un volume que les deux parties souhaitent voir augmenter. Une troisième session de coopération bilatérale est attendue dans les prochains mois, avec à l’étude plusieurs projets structurants, notamment une liaison ferroviaire entre le port ivoirien de San Pedro et la capitale guinéenne, Conakry.
Alassane Ouattara a profité de l’occasion pour exprimer son souhait de voir la Guinée retrouver une normalité constitutionnelle, et a réaffirmé son appui à un processus électoral apaisé. Ce positionnement s’inscrit dans la posture régionale de la Côte d’Ivoire, qui cherche à peser comme un partenaire de dialogue au sein de la CEDEAO, sans pour autant s’impliquer frontalement dans les affaires intérieures des régimes de transition.
Cette visite, bien que protocolaire, traduit une évolution diplomatique significative. La main tendue de Ouattara à Doumbouya, dans un contexte régional tendu marqué par les transitions militaires au Sahel, est un signal fort : la Côte d’Ivoire préfère miser sur la stabilité et la coopération pragmatique, plutôt que sur l’isolement de ses voisins. Reste à savoir si cette ouverture sera suivie de gestes concrets, notamment sur le plan économique et institutionnel, dans un pays où le retour à un ordre constitutionnel reste incertain.