À quatre mois de l’élection présidentielle en Côte d’Ivoire, le Parti des peuples africains-Côte d’Ivoire (PPA-CI) de Laurent Gbagbo et le Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI) dirigé par Tidjane Thiam ont officialisé la création d’un front commun. L’initiative, annoncée le 19 juin à Abidjan, vise à coordonner les actions des deux principales forces de l’opposition pour peser sur le processus électoral.
Signée par Danon Djédjé pour le PPA-CI et Akossi Bendjo pour le PDCI, la déclaration commune entend répondre aux multiples dysfonctionnements pointés dans l’organisation du scrutin. Elle réclame notamment la réintégration sur la liste électorale de plusieurs figures politiques écartées, dont Laurent Gbagbo, Tidjane Thiam, Guillaume Soro, Charles Blé Goudé et Akossi Bendjo lui-même. Les deux partis demandent également une révision en profondeur de la liste électorale et une refonte de la Commission électorale indépendante (CEI), jugée peu crédible.
Ce front commun s’inscrit dans un climat politique encore marqué par les exclusions et tensions des précédentes élections. Laurent Gbagbo, malgré son retour au pays après son acquittement par la CPI, reste radié du fichier électoral. Tidjane Thiam, exilé en France, connaît le même sort. Ces blocages, dénoncés par les deux leaders, alimentent les doutes sur l’inclusivité du scrutin à venir. L’appel à une proclamation bureau par bureau des résultats vise à prévenir toute accusation de fraude, comme celles qui ont émaillé le passé électoral ivoirien.
Le projet porté par Gbagbo et Thiam ne se limite pas à une alliance de circonstance. Il prévoit la création d’un Comité paritaire pour en définir les modalités pratiques, et ambitionne de structurer un contre-pouvoir capable de peser réellement dans le jeu électoral. Le message est clair : sans conditions équitables, l’élection risque d’être contestée avant même son déroulement. Pour les deux partis, il s’agit de créer les bases d’un scrutin « apaisé, transparent et démocratique ».
Lors de la cérémonie, Tidjane Thiam, intervenant par visioconférence, a salué cette initiative comme un pas vers une élection véritablement inclusive. Il a remercié Gbagbo d’avoir pris l’initiative, insistant sur la nécessité de garantir aux Ivoiriens le droit de choisir librement leur président. De son côté, l’ancien chef d’État a affirmé que « aucune lutte n’est désespérée », affirmant sa volonté de poursuivre le combat politique malgré les obstacles.
Dans la foulée, deux comités ont été mis en place : un Comité pilote du mouvement « Trop c’est trop », et un Comité opérationnel chargé de l’application des décisions politiques. Ces structures devraient renforcer l’ancrage local du front commun, mobiliser les électeurs et coordonner les initiatives de terrain. Reste à savoir si cette coalition de l’opposition parviendra à s’imposer face à un pouvoir solidement installé, et surtout, à éviter les divisions internes qui ont souvent fragilisé les fronts similaires par le passé.