En 2022, l’Afrique a reçu 8,2 milliards de dollars de financements publics et privés destinés au développement de son agriculture, soit plus que toutes les autres régions du monde réunies. Ce flux représente une augmentation de 56 % par rapport à l’année précédente, selon un rapport de la FAO publié début mai. Ce niveau de soutien place le continent au centre des priorités des bailleurs, dans un contexte de crises successives.
L’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) attribue cette progression à deux facteurs majeurs : les plans de relance post-COVID et l’impact de la guerre en Ukraine sur les chaînes d’approvisionnement mondiales. L’Ukraine, grand exportateur de blé, a vu sa production bouleversée, entraînant une flambée des prix mondiaux. Or, de nombreux pays africains, dépendants des importations de produits de base, ont dû faire face à une inflation alimentaire brutale. Les partenaires internationaux ont donc intensifié leur soutien au secteur agricole africain pour prévenir une crise alimentaire majeure.
Malgré cette dynamique, le financement du secteur agricole reste très marginal à l’échelle mondiale, ne représentant que 5 % du total des flux de développement. Historiquement, l’agriculture en Afrique souffre d’un sous-investissement chronique, en dépit de son rôle central dans les économies locales. Cette situation est aggravée par les effets du changement climatique, les conflits récurrents dans certaines régions et la faiblesse des politiques publiques nationales dans le secteur.
Le rapport de la FAO met également en lumière un paradoxe : alors que les petites et moyennes entreprises (PME) agricoles sont des acteurs clés de la production et de la transformation sur le continent, elles peinent encore à accéder aux financements. Sur les 90 milliards de dollars nécessaires à leurs activités en Afrique subsaharienne, seuls 15,5 milliards sont disponibles via les canaux formels, soit à peine 20 %. Ce déficit structurel freine leur développement et limite les effets d’entraînement du secteur sur l’emploi et la sécurité alimentaire.
Les rares financements disponibles proviennent en majorité de banques commerciales, qui privilégient les entreprises les plus solides : celles disposant d’un historique bancaire, d’une rentabilité prouvée et d’une gestion formalisée. Les jeunes entreprises, souvent rurales et informelles, sont ainsi exclues. Pour la FAO, une stratégie durable passe par un élargissement de l’offre de financement, via des instruments plus souples, des partenariats public-privé et une implication accrue des États africains.