En ce début d’année, la « janviose » sévit au Gabon. Il ne s’agit pas d’une nouvelle épidémie, mais d’un mal qui touche de très nombreuses personnes au mois de janvier. La « janviose » est ce terme de la rue qui désigne la galère, les poches vides après avoir tout dépensé pendant les fêtes de fin d’année.
Dans le IVe arrondissement de Libreville, Diane gère une petite imprimerie. Pas un client aujourd’hui. Elle a passé sa journée à se tourner les pouces : « Il n’y a pas de clients (rires) ! C’est vraiment la “janviose” qui a déjà commencé… »
La « janviose » se ressent notamment dans les marchés et supermarchés. Les clients – dont le porte-monnaie est vide en ce début d’année – s’arrachent les cheveux en voyant les prix : « Après les fêtes, on rencontre des difficultés (rires)… C’est parce que tout le monde s’affole dans les grosses courses, dans la fête, on dépense… Voilà ! », raconte une cliente. « Nous avons tout dépensé, avec Noël, le 1er janvier, avec le maigre salaire que nous avons, c’est difficile », explique une autre. « C’est compliqué pour moi, parce que je subis la “janviose” », conclut une passante.
Solidarité face à la « janviose »
Mais certaines ont réussi à ne pas succomber à la « janviose ». Comme Mireille Ntsame, comptable, qui s’est jurée de ne pas tomber dans le piège : « On s’assure toujours de payer ce qui est nécessaire avant d’effectuer les dépenses. C’est-à-dire la scolarité, le loyer, la nourriture. »
Emprunts auprès des banques, solidarité familiale, les victimes de la « janviose » se débrouillent comme elles peuvent. Delgado Sima, haut fonctionnaire, admet être souvent sollicité pour dépanner un parent ou un ami : « Tu es obligé de soutenir ton frère, tu ne tiens plus. Nous, les Africains, on est solidaires. Nous ne sommes pas les Européens ou les occidentaux. Tu ne vas pas voir ton frère galérer quand tu as un sac de riz. Tu lui donneras au moins deux kilos de riz. »
Bref, cette année encore, la «janviose» est de retour.
L’excès et la dépense sont des principes constitutifs de la fête, c’est-à-dire qu’il n’y a pas de fête sans excès, il n’y a pas de fête sans dépenses, et le système capitaliste organise bien cela.