Le candidat indépendant Fernando Dias da Costa, soutenu par une alliance hétéroclite, a provoqué une tension politique en Guinée-Bissau en revendiquant, dès le lundi 25 novembre, une victoire dès le premier tour de l’élection présidentielle du 23 novembre. Cette déclaration anticipée, intervenue avant toute proclamation officielle, contraste avec le calme rapporté durant le scrutin et jette un voile d’incertitude sur la suite du processus.
Dias da Costa, porté par le Parti du Renouveau Social (PRS) et la coalition Terra Ranka de Domingos Simões Pereira, a affirmé obtenir des résultats favorables dans la majorité des régions, à l’exception notable de Gabú. Il a salué la participation massive des électeurs, y voyant une aspiration au changement, et a insisté sur le respect des procédures légales supervisées par le ministère public. Son affirmation rejette explicitement toute hypothèse d’un second tour.
Cette élection s’inscrit dans un contexte politique bissau-guinéen marqué par une instabilité chronique. Le président sortant, Umaro Sissoco Embaló, élu en 2019, brigue un second mandat face à onze candidats, dont son propre prédécesseur, José Mário Vaz. L’absence de Domingos Simões Pereira, leader du Parti Africain pour l’Indépendance de la Guinée et du Cap-Vert (PAIGC, principal parti d’opposition), invalidé par la Cour suprême, a radicalement modifié la donne. Son ralliement derrière Dias da Costa a créé une alliance inédite contre le camp présidentiel.
La perspective immédiate est désormais celle d’une attente tendue pour les résultats officiels. La Commission électorale nationale (CNE) a un délai légal de sept à dix jours pour les proclamer, mais ses résultats provisoires étaient attendus dès le 27 novembre. La revendication prématurée de Dias da Costa risque de polariser le débat public et de tester la crédibilité des institutions. Un second tour, si les résultats officiels l’imposent, pourrait exacerber les tensions et remettre en cause la fragile stabilité du pays.
La Commission électorale a, de son côté, salué le déroulement globalement paisible du scrutin, malgré des défis logistiques rapidement résolus. Idriça Djaló, son secrétaire exécutif adjoint, a mis en garde contre la diffusion de chiffres non officiels et a rappelé que la proclamation des résultats était l’exclusive prérogative de la CNE. L’institution a dû gérer en urgence des incidents dans la diaspora, au Portugal et en France, en autorisant l’usage du fichier électoral de 2023 pour garantir le vote des expatriés.
Au-delà des déclarations politiques, les observateurs notent une mobilisation citoyenne significative, avec plus de 960 000 électeurs inscrits. La CNE a également salué “l’esprit de cordialité” affiché par les candidats et la forte implication des femmes et des jeunes, perçue comme un signe d’une maturation démocratie. Cependant, l’enjeu ultime reste la capacité des acteurs politiques à respecter la verdict des urnes, quel qu’il soit, dans un pays où l’alternance pacifique a souvent été un idéal fragile.



