Produire de l’hydrogène vert en Afrique pour l’exporter vers l’Europe coûtera bien plus cher que ce qu’avaient anticipé les décideurs. Selon un rapport publié le 2 juin 2025 par des chercheurs de Munich, d’Oxford et de Zurich, seuls 2,1 % des 10 300 sites analysés sur le continent pourraient atteindre un prix compétitif sans soutien massif des gouvernements européens.
Les chercheurs ont mis en évidence l’énorme variabilité des coûts de financement selon les pays africains. Alors que les modèles classiques tablent sur un taux d’intérêt de 4 à 8 %, les taux réels pourraient grimper jusqu’à 27 % en fonction du contexte local. Ce différentiel est lié à l’instabilité politique, aux conditions juridiques et à l’accès limité aux infrastructures. Sans intervention politique forte de la part de l’UE — garanties de paiement, prix d’achat fixe — les projets africains risquent de ne jamais décoller.
Depuis quelques années, l’UE mise sur l’hydrogène vert africain pour décarboner ses industries. Des partenariats ont été signés avec des pays comme la Namibie, la Mauritanie ou encore l’Égypte. Mais sur le terrain, les projets restent embryonnaires et les incertitudes financières freinent les investissements. À l’approche de l’échéance 2030, les ambitions européennes se heurtent à une réalité complexe.
Même avec un fort appui européen, les producteurs africains auront du mal à concurrencer d’autres régions. En 2024, une enchère de la Banque européenne de l’hydrogène a validé un prix inférieur à 3 euros/kg en Europe, contre 3,8 euros/kg au mieux pour l’Afrique avec soutien politique. Cette pression internationale pourrait reléguer le continent au second plan, malgré son potentiel solaire et éolien.
Sur les 10 300 sites côtiers étudiés, seuls 214 — situés en Algérie, au Maroc, en Mauritanie, au Kenya, en Namibie et au Soudan — pourraient atteindre un seuil de rentabilité d’ici 2030, à condition de bénéficier d’accords fermes et de soutiens publics. Toutefois, même parmi ces pays, les risques sécuritaires locaux pourraient compromettre les projets les plus prometteurs. Le rapport reconnaît que nombre de zones à fort potentiel sont situées dans des régions instables.
En conclusion, les auteurs du rapport insistent sur un point : sans garanties d’achat à prix fixe et protections contre les défauts de paiement, la production d’hydrogène vert en Afrique pour l’Europe restera non compétitive. Seuls des mécanismes de soutien financier robustes — à l’image de ceux de la Banque mondiale — pourraient réduire les coûts d’investissement et rendre ces projets économiquement viables à long terme.