L’attiéké, cette célèbre spécialité culinaire ivoirienne à base de manioc, vient d’être inscrit au patrimoine culturel immatériel de l’Unesco. L’annonce a été faite lors de la 19e session du Comité intergouvernemental de sauvegarde du patrimoine culturel immatériel, qui se tient actuellement au Paraguay. Cette reconnaissance suscite une grande fierté pour la Côte d’Ivoire, en particulier pour les femmes qui, au quotidien, perpétuent ce savoir-faire ancestral, et pour les acteurs qui s’efforcent de promouvoir ce produit à l’échelle internationale.
L’attiéké est bien plus qu’une simple semoule de manioc fermenté. Il s’agit d’un pilier de l’alimentation quotidienne en Côte d’Ivoire et dans de nombreux pays d’Afrique de l’Ouest. Légèrement aigre, il accompagne poissons, viandes en sauce et divers mets traditionnels, enrichissant ainsi les tables ivoiriennes. À Anono, un village situé en plein cœur d’Abidjan, des femmes s’activent autour des tubercules de manioc. Elles épluchent, râpent, fermentent et cuisent le manioc, préservant ainsi un savoir-faire transmis de génération en génération, désormais reconnu par l’Unesco. Pour Dorothée, doyenne des productrices d’attiéké, cette distinction est une immense fierté mais aussi une opportunité pour l’avenir.
La production de l’attiéké repose sur une série d’étapes rigoureuses qui lui confèrent sa saveur unique. La fermentation du manioc, appelée “magnan”, est essentielle pour obtenir la qualité recherchée. Comme l’explique Anne-Marie, l’une des productrices, la fermentation dure généralement trois jours, avant que le manioc ne soit broyé, pressé pour obtenir des grains, puis cuit. Ces étapes, méticuleusement respectées, confèrent à l’attiéké ivoirien son goût distinct, apprécié au-delà des frontières du pays.
Cette inscription au patrimoine immatériel de l’Unesco ouvre également de nouvelles perspectives pour la distribution internationale de l’attiéké. Tapé Clément, gérant de l’entreprise Cotravi à Abobo Akeikoi, voit dans cette reconnaissance une opportunité pour structurer davantage la filière. Chaque année, Cotravi expédie près de quarante tonnes d’attiéké déshydraté vers l’Europe et les États-Unis. Pour répondre à la demande croissante, notamment en Europe, Clément appelle l’État à établir des contacts avec des distributeurs européens et à organiser des participations à des foires internationales.
En plus de son inscription au patrimoine de l’Unesco, l’attiéké bénéficie désormais du statut de “marque collective”. Concrètement, seule la semoule de manioc fermentée produite en Côte d’Ivoire pourra porter l’appellation “attiéké”. Cette distinction garantit l’origine et la qualité du produit, protégeant ainsi les producteurs ivoiriens face à la concurrence, notamment de pays qui tentent de s’approprier ce savoir-faire.
L’inscription de l’attiéké au patrimoine immatériel est une étape importante pour la reconnaissance internationale de la culture ivoirienne. Au-delà de la fierté nationale, cette consécration ouvre la voie à une meilleure structuration de la filière, à l’amélioration des conditions de production et à une distribution accrue à l’échelle mondiale. Pour les Ivoiriens, et particulièrement pour les femmes qui maintiennent cette tradition vivante, cette reconnaissance est un signal fort qui célèbre leur rôle essentiel dans la transmission de ce patrimoine culinaire emblématique.