À l’occasion du 65ᵉ anniversaire de son indépendance, le Bénin a officiellement invité des soldats du Burkina Faso et du Niger à participer au défilé militaire prévu le 1ᵉʳ août 2025 à Cotonou. Un geste fort de la part du président Patrice Talon, dans un contexte de relations diplomatiques dégradées avec ces deux pays membres de l’Alliance des États du Sahel (AES).
C’est le porte-parole du gouvernement, Wilfried Léandre Houngbédji, qui a révélé l’initiative lors d’une conférence de presse. Quatre pays ont été conviés, dont deux appartiennent à l’AES. Bien que leurs noms n’aient pas été mentionnés explicitement, tout laisse penser qu’il s’agit du Burkina Faso et du Niger, tous deux frontaliers du Bénin. Si deux pays ont déjà confirmé leur participation, la réponse des États de l’AES reste incertaine. Pour Cotonou, cette invitation vise à rappeler que les liens humains et historiques entre les peuples de la région priment sur les tensions politiques.
Depuis le coup d’État de juillet 2023 ayant renversé Mohamed Bazoum au Niger, les relations entre le Bénin et les régimes militaires de Niamey et Ouagadougou se sont fortement dégradées. Alors que Cotonou soutenait les positions de la CEDEAO, l’AES voyait dans cette posture une proximité avec l’Occident et une hostilité déguisée. Le Burkina Faso et le Niger ont même accusé le Bénin d’abriter des bases militaires françaises visant à les déstabiliser, des allégations catégoriquement rejetées par les autorités béninoises et françaises.
Malgré les accusations et les ruptures diplomatiques, Patrice Talon maintient une ligne d’ouverture. L’objectif affiché : retisser les liens régionaux, relancer une coopération sécuritaire suspendue et montrer que le Bénin reste attaché à la stabilité de l’espace ouest-africain. L’invitation aux troupes de l’AES s’inscrit dans cette stratégie d’apaisement. Le chef de l’État semble vouloir signifier que la politique de repli et de confrontation prônée par certains régimes de l’AES n’est pas une fatalité.
En parallèle, la participation confirmée de la Côte d’Ivoire, autre partenaire régional, donne un ton plus consensuel à ces célébrations. Abidjan enverra une unité de son armée défiler aux côtés des soldats béninois. Un signal positif pour la cohésion régionale, alors que l’espace CEDEAO tente de retrouver son équilibre, miné par les sorties successives du Mali, du Burkina Faso et du Niger.
Si le geste du Bénin est salué comme une tentative de désescalade, il reste suspendu à la réponse des régimes sahéliens. La participation effective des troupes du Niger et du Burkina Faso constituerait un premier pas vers un dégel, mais rien ne garantit pour l’instant leur présence. L’enjeu dépasse le simple cadre protocolaire : il s’agit de voir si les logiques de rupture peuvent être surmontées au profit d’une reconstruction pragmatique des relations entre États d’une même région.