La Centrafrique va-t-elle abandonner la cryptomonnaie qu’elle vient de choisir comme monnaie officiel avec le Franc CFA, il y moins de trois mois et qui lui semble le moyen le plus idoine pour parvenir à son développement ? C’est la question qu’on peut se poser après la réunion extraordinaire du conseil d’administration de la Beac qui s’est tenue mardi et hier à Douala au Cameroun. Jusqu’à hier, une rumeur faisait état d’une résolution de ce conseil demandant à la Centrafrique d’abandonner son projet de cryptomonnaie s’il tient à rester au sein de la Cema et de l’Union monétaire de l’Afrique centrale (UMAC). Néanmoins le communiqué final signé hier le 21 juillet 2022 stipule ceci : « Après avoir examiné les implications de la loi régissant la cryptomonnaie en République centrafricaine sur l’architecture règlementaire de la communauté en matière monétaire et financière, le conseil d’administration a accueilli favorablement l’expression par la RCA de son attachement à la monnaie unique et au respect des statuts de la Banque des États de l’Afrique centrale, des textes régissant l’union monétaire et ses engagements communautaires ». Autrement dit, la Centrafrique reste solidaire des statuts communautaires de l’UMAC interdisant l’usage d’une autre monnaie que le FCFA dans les six pays de la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (CEMAC).
Mais un peu plus loin, on peut lire ceci : « le conseil d’administration de la Beac a « pris bonne note de la sollicitation par la République centrafricaine, de l’assistance de la Beac et des instances compétentes de la communauté, pour l’élaboration d’un cadre normatif régissant les cryptoactifs dans la Cemac ».
Quand on parcourt bien les textes régissant la Cemac et l’Uma, on comprend en filigrane que, comme ils interdisent la cryptomonnaie, la Centrafrique accepte indirectement de mettre en veilleuse de son « Sangocoin » jusqu’à la mise en place en commun d’un « cadre normatif régissant les cryptoactifs dans la Cemac ».
Que dire de cette coupure de la poire en deux ? Probablement, les états de la Cemac et de l’Umac bien que désapprouvant l’initiative de la République Centrafricaine, n’ont cependant pas opté pour son isolement ou même la rupture. En contrepartie de l’acceptation par ce pays de ne pas quitter la Cemac et l’Umac, ils ont décidé de l’accompagner dans la recherche d’une issue de sortie honorable, en réfléchissant ensemble, a travers la Beac et l’Uma, a la mise en place « d’un cadre normatif régissant les cryptoactifs dans la Cemac ». Un joli projet auquel il faut néanmoins donner un contenu satisfaisant tout le monde. D’autant plus qu’a cet accompagnement en douce mais ferme des états membres de la Cemac, il faut aussi ajouter l’injonction du Fmi et des bailleurs de fonds internationaux a ce pays, l’un des plus pauvres d’Afrique et du monde, d’abandonner sa cryptomonnaie à laquelle il semble fonder beaucoup d’espoir. Chaud devant, mais on ne perd rien à attendre.
Billet de Evariste Fopoussi Fotso, Economiste