Le Burundi a franchi une nouvelle étape dans l’accès à la planification familiale en adoptant l’auto-injection du contraceptif féminin DMPA (acétate de médroxyprogestérone dépôt). Cette méthode, déjà utilisée depuis 2020 sous supervision, permet désormais aux femmes de s’administrer elles-mêmes leur contraception, renforçant ainsi leur autonomie tout en facilitant l’accès à la santé reproductive.
L’auto-injection du DMPA, connue sous le nom commercial Sayana Press, offre une alternative pratique qui réduit les contraintes liées aux déplacements et aux rendez-vous réguliers dans les centres de santé. Selon Ananie Ndacayisaba, directeur du Programme national de santé de la reproduction (PNSR), cette innovation s’inscrit dans un processus progressif : d’abord administrée par des professionnels, puis par des agents de santé communautaires, elle est désormais confiée aux femmes elles-mêmes après une formation adaptée. Ces dernières doivent réaliser un premier essai d’auto-injection sous supervision avant d’être autonomes pour les injections trimestrielles suivantes.
Cette avancée s’inscrit dans un contexte où le Burundi cherche à améliorer ses indicateurs de santé reproductive. Le taux d’utilisation des contraceptifs est aujourd’hui de 28,8 %, avec des objectifs ambitieux de 60 % en 2040 et 85 % en 2060. Parallèlement, le pays vise à réduire son indice de fécondité, qui est actuellement de 5,5 enfants par femme, à 3 en 2040 et 2,5 en 2060. Le déploiement de cette méthode auto-administrée est pensé comme un levier clé pour atteindre ces objectifs en facilitant l’accès et l’acceptation des contraceptifs, notamment dans les zones rurales.
Au-delà de la dimension sanitaire, l’auto-injection marque une volonté politique de décentraliser les services de santé et d’autonomiser les femmes. Gloriose Ndayizeye, cadre au ministère de la Santé, souligne que ce dispositif diminue les barrières géographiques et socio-économiques, offrant aux femmes un contrôle accru sur leur santé reproductive. Cette approche vise aussi à alléger la pression sur les structures sanitaires, souvent surchargées, tout en garantissant une continuité des soins plus fluide.
Sur le terrain, les professionnels de santé salue cette innovation. Jeanne d’Arc Irakoze, infirmière à Gitega, rappelle que l’auto-injection réduit le nombre de consultations liées aux contraceptifs, libérant du temps pour d’autres soins urgents. Du côté des utilisatrices, l’expérience est tout aussi positive. Diane Nizerimana, mère de quatre enfants, témoigne d’un regain de sérénité depuis qu’elle utilise Sayana Press. « Avant, je craignais chaque rapport sexuel, aujourd’hui je me sens plus libre et sereine », confie-t-elle.
Après une phase pilote réussie, la généralisation de cette méthode va s’étendre progressivement à d’autres provinces. Toutefois, pour assurer son adoption à grande échelle, il faudra surmonter des défis culturels et renforcer l’information auprès des femmes. La réussite de cette innovation dépendra aussi de la capacité des autorités à accompagner ces changements dans un environnement souvent marqué par des résistances sociales.