La 29e édition du Festival panafricain du cinéma et de la télévision de Ouagadougou (Fespaco), qui débute ce samedi 22 février à Ouagadougou, se déroule sous un ciel sombre après la perte tragique du réalisateur malien Souleymane Cissé, qui devait présider le jury de la catégorie « long métrage ». Cette disparition n’a pas terni l’enthousiasme pour un événement majeur de la culture africaine, qui reste un espace privilégié pour la promotion du cinéma panafricain et l’émergence de nouvelles voix artistiques.
Le Fespaco de cette année incarne une dynamique de renouvellement. Selon le réalisateur mauritanien Abderrahmane Cissako, chaque édition du festival représente une nouvelle rencontre entre les générations de cinéastes. La question du genre, désormais au cœur des préoccupations des réalisateurs, est particulièrement présente cette année. Ce sont en effet de nombreuses réalisatrices qui participent dans les différentes sections du festival, ce qui laisse envisager une forte probabilité qu’une femme décroche l’Etalon de Yennenga, le plus prestigieux prix du festival.
Le Fespaco, qui n’est pas seulement un événement cinématographique, mais aussi un espace d’expression et de liberté, a toujours eu un rôle symbolique dans le paysage politique et culturel de l’Afrique. Le réalisateur congolais Balufu Bakupa-Kanyinda, créateur du prix Thomas-Sankara, se souvient avoir projeté un film sur l’icône révolutionnaire Thomas Sankara en 1993, au moment où ceux responsables de son assassinat étaient au pouvoir. Cet exemple montre à quel point le Fespaco a été un lieu d’affirmation des droits et de la liberté d’expression à travers les époques.
La 29e édition du Fespaco met le Tchad à l’honneur, un pays qui, bien que riche d’un potentiel cinématographique, reste en retrait comparé à d’autres nations africaines comme le Nigeria, le Sénégal ou le Maroc. Le réalisateur et producteur tchadien Issa Serge Coelo déplore la sous-production dans son pays et la faiblesse des films produits, qu’il qualifie de « bricolage ». Il plaide pour la mise en place d’une véritable politique d’accompagnement pour soutenir les jeunes cinéastes et stimuler une véritable industrie cinématographique tchadienne, notamment à travers la création d’un fonds de soutien et des formations spécialisées.
Au-delà des hommages rendus à Souleymane Cissé, cette édition du Fespaco reste un moteur de la création cinématographique en Afrique. En compétition officielle, le film « Diya » d’Achille Ronaimou, représentant du Tchad, incarne cette volonté de faire entendre une nouvelle voix tchadienne sur la scène internationale. Cette compétition met également en lumière la diversité des productions africaines, témoignant d’une richesse et d’une pluralité des formes et des approches qui continuent d’évoluer.
Le Fespaco 2025 montre ainsi un avenir prometteur pour le cinéma africain. Entre deuil et renouveau, l’événement offre une plateforme pour les jeunes talents et permet de réfléchir aux défis à venir. Les transformations qui s’opèrent dans le cinéma africain, notamment en matière de genre, de financement et de formation, laissent espérer des perspectives favorables pour les années à venir, marquées par une plus grande reconnaissance du cinéma africain sur la scène internationale.