Le maréchal Khalifa Haftar a nommé son fils, le lieutenant-général Saddam Haftar, au poste d’adjoint au commandement général de l’armée libyenne. Cette décision, annoncée début août, provoque une forte réaction sur la scène politique et institutionnelle libyenne, certains dénonçant une manœuvre destinée à renforcer un pouvoir familial déjà dominant dans l’Est du pays.
D’après les médias locaux, Abdullah Al-Lafi, membre du Conseil présidentiel, a convoqué une réunion urgente du commandement général. Il a rappelé que toute création ou attribution de poste militaire relève du commandement suprême — incarné collectivement par le Conseil présidentiel — et doit être validée par l’autorité législative. Du côté des soutiens de Haftar, notamment dans l’Est, la nomination est présentée comme partie intégrante de la « Vision 2030 » visant à moderniser et structurer l’armée. Aguila Saleh, président de la Chambre des représentants, a publiquement félicité Saddam Haftar, marquant ainsi un appui politique de poids.
La Libye reste profondément fracturée depuis la chute de Mouammar Kadhafi en 2011, avec deux autorités rivales : le gouvernement d’union nationale basé à Tripoli, reconnu par l’ONU, et l’administration parallèle de l’Est, soutenue par Khalifa Haftar. Le processus d’unification des institutions, y compris l’armée, avance difficilement. Dans ce climat, la promotion du fils du maréchal alimente les critiques sur une dérive dynastique, accentuant la méfiance entre l’Est et l’Ouest.
Sur le plan international, les diplomates rappellent que l’unification de la chaîne de commandement militaire est une condition essentielle pour relancer le dialogue politique sous l’égide de l’ONU. Cette nomination unilatérale pourrait compliquer les efforts de médiation et retarder toute avancée vers des élections nationales, déjà maintes fois reportées. La fragmentation institutionnelle risque ainsi de se prolonger.
Les adversaires de Haftar estiment que cette décision renforce une militarisation du pouvoir qui échappe aux cadres légaux, créant un précédent dangereux pour l’équilibre institutionnel. Du côté de l’ONU et des partenaires étrangers de la Libye, une prise de position publique pourrait intervenir si la nomination venait à bloquer des initiatives de rapprochement entre factions rivales. La réaction du Conseil présidentiel, qui détient formellement l’autorité militaire suprême, sera déterminante pour la suite.