Le marché de l’intelligence artificielle (IA) en Afrique devrait connaître une croissance moyenne annuelle de 27,4 % d’ici 2030, pour atteindre 16,5 milliards de dollars, selon un rapport publié par Mastercard le 5 août 2025. Ce développement rapide est présenté comme un levier potentiel de transformation économique majeure pour le continent, malgré des défis persistants liés aux infrastructures, à la formation des talents et à la gouvernance des données.
Ce rapport intitulé « Harnessing the transformative power of AI in Africa » détaille comment l’IA pourrait générer jusqu’à 230 millions d’emplois en Afrique subsaharienne d’ici 2030. Cette dynamique s’appuie sur plusieurs initiatives locales de formation et d’innovation, mais reste freinée par une pénurie de compétences dans ce domaine. Le rapport souligne par ailleurs que l’IA offre à l’Afrique une opportunité unique, grâce à sa jeunesse démographique — l’âge médian est de 19 ans — et à ses ressources naturelles, notamment 60 % des terres arables mondiales, pour accélérer l’inclusion financière, améliorer la production agricole et réduire les inégalités.
Le contexte de cette évolution s’inscrit dans un paysage économique africain en pleine mutation, où plusieurs pays comme l’Afrique du Sud, le Kenya ou le Nigeria prennent les devants en adoptant des politiques publiques favorables à l’IA. Parallèlement, des partenariats avec des géants internationaux comme Google, Microsoft ou Mastercard renforcent le soutien à l’écosystème local. Toutefois, cette progression se heurte à de nombreuses limites structurelles, telles que des infrastructures numériques encore insuffisantes, une faible capacité des centres de données concentrée principalement en Afrique du Sud, et un accès à Internet inégal. La diversité linguistique et culturelle, souvent négligée dans les modèles importés, représente également un obstacle important.
Les perspectives à moyen terme laissent entrevoir un continent qui pourrait, en mobilisant ses ressources, réduire considérablement son retard technologique. L’IA devrait notamment jouer un rôle crucial dans des secteurs clés comme la finance, la santé, l’agriculture, l’éducation et l’énergie. Des exemples concrets montrent déjà des succès : au Ghana, la startup Farmerline augmente la productivité agricole de 30 % grâce à l’IA ; au Kenya, M-Pesa et M-KOPA exploitent des algorithmes pour étendre l’accès au crédit. Dans le domaine sanitaire, des Healthtechs comme Babylon au Rwanda utilisent l’IA pour améliorer l’accès aux soins en zones rurales. L’adoption de compteurs intelligents et de micro-réseaux énergétiques pilotés par l’IA en Afrique du Sud illustre l’usage croissant des technologies dans la gestion des ressources.
Enfin, l’analyse du rapport met en lumière les priorités à adresser pour concrétiser ce potentiel. Il faudra renforcer les formations spécialisées, adapter les modèles d’IA aux langues et cultures locales, et surtout mettre en place des cadres de gouvernance adaptés afin d’éviter les dérives éthiques et les risques d’exclusion. Sans un effort coordonné pour garantir la qualité des données et la régulation, l’adoption de l’IA pourrait accentuer les inégalités existantes plutôt que les réduire. L’avenir de l’IA en Afrique dépend donc autant de la volonté politique que des investissements ciblés, dans un contexte où le continent ne doit plus se contenter d’être simple consommateur de technologies, mais chercher à en être un acteur créateur et autonome.