À la tête de l’Autorité des chefs d’État de la Cédéao depuis fin juin, le président sierra-léonais Julius Maada Bio a réaffirmé sa volonté de retisser les liens avec les trois pays du Sahel — Burkina Faso, Mali et Niger — qui ont quitté l’organisation en janvier 2025. Recevant à Freetown le président de la Commission de la Cédéao, Omar Alieu Touray, Maada Bio a lancé un nouvel appel au dialogue, proposant un « partenariat plus étroit et plus fort » entre la Cédéao et la Confédération des États du Sahel (AES).
Ce geste s’inscrit dans la continuité de la stratégie initiée par son prédécesseur nigérian Bola Tinubu, qui avait insisté sur le maintien d’une porte ouverte pour les États dissidents. À Freetown, Maada Bio a souligné l’importance d’un rapprochement entre les deux blocs pour renforcer la libre circulation, le commerce et la stabilité régionale. Il a également exprimé son soutien aux processus de transition démocratique en Guinée, ainsi qu’aux scrutins prévus en Côte d’Ivoire et en Guinée-Bissau.
L’appel du président sierra-léonais intervient sept mois après l’entrée en vigueur du retrait officiel du Mali, du Burkina Faso et du Niger, conformément au traité révisé de la Cédéao. Ce départ, annoncé en janvier 2024, a été formellement acté un an plus tard. Pour accompagner cette sortie inédite, une troïka ministérielle appuyée par un négociateur en chef a été désignée lors du sommet d’Abuja en juin, avec pour mission de gérer les conséquences institutionnelles et sécuritaires tout en protégeant les droits des citoyens.
Depuis la création officielle de leur confédération en juillet 2024, les trois pays sahéliens ont multiplié les symboles d’unité : drapeau, hymne, passeport commun, et projet de force militaire conjointe. Malgré la rupture avec la Cédéao, ils restent disposés à maintenir des canaux de communication ouverts, comme en témoigne la rencontre organisée le 22 mai à Bamako entre la Commission de la Cédéao et les ministres des Affaires étrangères de l’AES.
Maada Bio a suggéré l’organisation d’un sommet spécial pour réfléchir à l’avenir de l’Afrique de l’Ouest, à l’aune des cinquante ans de coopération au sein de la Cédéao. L’objectif serait d’ouvrir un nouveau chapitre fondé sur une vision commune, incluant potentiellement des États aujourd’hui en marge du cadre institutionnel régional.
En parallèle à ces démarches diplomatiques, plusieurs contentieux internes à la Cédéao subsistent. Omar Alieu Touray a évoqué les difficultés autour de la Taxe communautaire de développement (TCD) et a annoncé l’envoi d’une mission conjointe en Sierra Leone et en Guinée pour contribuer à résoudre le différend frontalier de Yenga. Ces tensions internes ajoutent à la complexité du moment, où l’enjeu principal reste la capacité de la Cédéao à se réinventer sans se fragmenter.