Le secteur minier rwandais a connu une croissance spectaculaire en 2024, avec des revenus atteignant 1,7 milliard de dollars, contre 1,1 milliard de dollars en 2023. Le pays se positionne de plus en plus comme un hub pour le traitement des métaux stratégiques, notamment l’étain, le tungstène, le tantale, et l’or. Toutefois, cette ascension est ternie par des accusations récurrentes de pillage des ressources naturelles en République Démocratique du Congo (RDC), qui persistent malgré les efforts du Rwanda pour renforcer sa légitimité à l’international.
Afin d’attirer les investisseurs, le Rwanda a lancé un appel d’offres le 1er mai 2025, en publiant un dossier d’investissement pour les opérateurs miniers. Ce document présente dix blocs miniers riches en cassitérite et coltan, des minerais prisés pour leur utilisation dans l’industrie des technologies. Les investisseurs intéressés doivent soumettre des propositions détaillant leurs projets d’exploitation, en mettant l’accent sur la transformation locale des minerais, le développement communautaire et la gestion environnementale. L’appel à candidatures vise également à renforcer la transparence et à garantir que les chaînes d’approvisionnement respectent les standards internationaux.
We are excited to announce the release of the Rwanda Mining Investment Pitchbook.
Download it here: https://t.co/PwgPDezmE8
Read the full requirements here:https://t.co/SIjllGMRAt pic.twitter.com/y0ttP17v5X— Rwanda Mines,Petroleum and Gas Board (@RwandaMinesB) May 1, 2025
Ce dossier d’investissement s’inscrit dans une campagne de communication plus large, alors que le Rwanda cherche à redorer son image en tant que fournisseur responsable de minerais. Cette initiative intervient dans un contexte de tensions diplomatiques exacerbées par les accusations de la RDC concernant l’exploitation illégale de ressources. Depuis plusieurs années, le Rwanda est accusé d’exploiter les richesses minérales congolaises, notamment le coltan et l’or, extraits de zones sous contrôle des groupes armés dans l’est de la RDC. Ces accusations ont conduit à des sanctions internationales, notamment de l’Union européenne, visant certains acteurs du secteur minier rwandais, dont Francis Kamanzi, le directeur général du Rwanda Mines, Petroleum and Gas Board (RMB), et la raffinerie d’or de Gasabo à Kigali.
Face à ces accusations, Kigali mène une offensive diplomatique visant à prouver sa volonté de respecter les normes internationales en matière de gestion des ressources naturelles. Le Rwanda cherche ainsi à se démarquer des pratiques illégales de contrebande de minerais et à affirmer sa position sur le marché minier international. En témoignent les récents développements, comme la publication d’un documentaire promotionnel financé par le RMB, intitulé Invest Rwanda: Mines to Milestones, diffusé par CNBC Africa. Ce documentaire met en avant la montée en puissance du secteur minier rwandais et ses ambitions de devenir un acteur majeur dans les minerais stratégiques en Afrique.
La situation reste cependant complexe. Si le Rwanda poursuit son objectif de devenir un centre minier régional, son image reste ternie par les accusations persistantes et le manque de transparence quant à l’exploitation de ses ressources. L’absence d’investissements miniers à grande échelle par des groupes internationaux, ainsi que l’absence d’évaluations indépendantes du potentiel minier du pays, soulèvent des interrogations. En outre, les allégations de réexportation de minerais congolais extraits illégalement continuent d’affecter sa réputation.
Conflit à l’est de la RDC : une semaine pour concilier de multiples intérêts https://t.co/y9T9FAkDbf pic.twitter.com/Qg5WHSAByG
— Bankable RDC (@Bankable_RDC) April 26, 2025
Néanmoins, une nouvelle étape pourrait être franchie avec la déclaration conjointe signée fin avril 2025 entre la RDC, le Rwanda et les États-Unis. Cette déclaration vise à renforcer la coopération régionale et à promouvoir une chaîne de valeur minière légale et transparente. Pour le Rwanda, cela représente à la fois une opportunité de légitimation et un test pour démontrer qu’il peut jouer un rôle constructif dans la régulation du secteur minier, tout en évitant les dérives associées à la contrebande de minerais en provenance de la RDC. Cette dynamique pourrait redéfinir les relations économiques entre ces deux voisins, tout en consolidant la place du Rwanda sur la scène minière internationale.