Alors que les tensions entre Niamey et Paris s’intensifient depuis le coup d’État de 2023, le groupe français Orano admet que plusieurs acteurs manifestent de l’intérêt pour ses actifs miniers au Niger. Le géant de l’uranium, en perte de vitesse sur place, reconnaît désormais que la cession de ses sites dans le nord du pays est une option sur la table.
Selon une déclaration transmise à l’AFP, Orano précise que « plusieurs parties ont exprimé leur intérêt » pour ses installations au Niger, et qu’elles sont libres de soumettre des offres. Bien que l’entreprise ne fournisse pas davantage de détails, cette ouverture marque un tournant. Sur le terrain, la situation est déjà critique : Orano a perdu le contrôle du site de la Somaïr, où reposent plus de 1 000 tonnes d’uranium valorisées à environ 250 millions d’euros. L’ancien site de la Cominak est à l’arrêt, et les travaux de réhabilitation sont suspendus. Quant à Imouraren, l’un des plus vastes gisements d’uranium au monde, son permis d’exploitation a été retiré au groupe début 2024.
Ces difficultés s’inscrivent dans un contexte de rupture diplomatique entre le Niger et la France. Depuis l’arrivée au pouvoir des militaires en juillet 2023, Niamey a pris ses distances avec Paris et cherche à diversifier ses partenaires stratégiques, en se tournant notamment vers Moscou. Le cas Orano illustre cette volonté de souveraineté énergétique et de contrôle des ressources naturelles. Le groupe français, dont l’État détient 90 % du capital, se retrouve aujourd’hui isolé dans une zone qu’il exploitait depuis plus de cinquante ans.
Orano dit rester « ouvert au dialogue », mais n’exclut plus un désengagement progressif. Sa priorité actuelle, affirme-t-il, est de faire valoir ses droits à travers des mécanismes d’arbitrage international. Il a saisi le Centre international pour le règlement des différends relatifs aux investissements (CIRDI), dans l’espoir d’obtenir réparation pour la perte de ses droits miniers. Mais ce processus pourrait s’étendre sur plusieurs années, sans garantie de succès.
L’ouverture à d’éventuels acquéreurs suscite déjà des convoitises. Bien que les noms des acteurs intéressés n’aient pas été dévoilés, le contexte géopolitique laisse penser que des entreprises russes ou chinoises pourraient se positionner. Pour Niamey, ce serait l’occasion de consolider de nouveaux partenariats plus alignés avec ses ambitions actuelles. Pour Orano, en revanche, céder ses actifs dans des conditions de tension politique pourrait s’avérer coûteux, tant sur le plan financier que symbolique.
Si la sortie d’Orano du Niger se confirme, ce serait la fin d’un chapitre majeur de la présence française dans l’exploitation de l’uranium sahélien. Pour les populations locales, les perspectives restent floues. Entre promesses de souveraineté retrouvée et incertitudes sur la gestion future des sites, les enjeux économiques, environnementaux et sociaux restent considérables.