Le Nigeria a révélé un investissement étranger direct de 400 millions de dollars pour construire ce qui est présenté comme la plus grande usine de traitement de terres rares en Afrique. Ce projet, mené par la société Hasetins Commodities Ltd, doit s’implanter dans l’État de Nasarawa. Il s’agirait d’une installation de 12 000 tonnes par an, en complément d’un site déjà opérationnel de 6 000 tonnes. Mais au-delà de l’effet d’annonce, de nombreuses incertitudes demeurent : ni le calendrier, ni les sources d’approvisionnement, ni la nature précise des minéraux concernés n’ont été communiqués.
Le flou persiste également sur la structuration financière du projet. On ne sait pas si les 400 millions de dollars sont déjà sécurisés, ni s’ils émanent de capitaux propres, de prêts ou de partenaires encore inconnus. Le ministère nigérian des Mines, par la voix de Dele Alake, n’a pas apporté de précisions supplémentaires, ce qui renforce les doutes sur la viabilité à court terme de l’initiative. Hasetins n’a pas publié d’étude technique, ni de plan d’exploitation, contrairement à d’autres projets africains plus avancés.
En 2024, le Nigeria a produit 13 000 tonnes de terres rares, selon l’United States Geological Survey, soit une progression notable par rapport aux 7 200 tonnes de 2023. Mais ce volume reste faible au regard des ambitions nationales et du potentiel annoncé. En l’absence de données officielles sur les sites d’exploitation ou la chaîne de transformation, il est probable qu’une partie de cette production provienne de l’artisanat minier, difficilement traçable. Le pays figure dans les classements comme un acteur à potentiel, mais encore peu structuré.
We have pledged our support for a Foreign Direct Investment (FDI) initiative to establish Africa’s largest rare earth and critical minerals processing plant, driven by a $400 million investment from Hasetins Commodities Ltd in Nasarawa State.
This project represents over 10,000… pic.twitter.com/AIN7tuUxd7
— Dele Alake (@AlakeDele) June 22, 2025
Face au Nigeria, d’autres pays africains avancent plus méthodiquement. Le Burundi, l’Angola, la Tanzanie ou encore la Namibie accueillent des projets portés par des entreprises cotées, avec des données techniques publiques et des échéanciers clairs. L’Angola, par exemple, veut produire 20 000 tonnes de carbonate de terres rares par an à Longonjo dès 2026, tandis que la Tanzanie affiche une capacité prévisionnelle de 37 200 tonnes avec le projet Ngualla. Ces initiatives montrent que la concurrence est déjà bien organisée sur le continent.
En dépit des incertitudes, Abuja soutient pleinement l’initiative de Hasetins. Le ministre Alake met en avant les retombées économiques attendues : plus de 10 000 emplois directs, un transfert de compétences, et une montée en gamme de la transformation locale. L’objectif affiché par le gouvernement est ambitieux : faire passer la part des mines de 1 % à 10 % du PIB d’ici à 2026. Avec un sous-sol estimé à 700 milliards de dollars, le Nigeria veut accélérer la diversification de son économie, jusque-là trop dépendante du pétrole.
Reste à savoir si Hasetins Commodities a la capacité technique et financière de mener à bien un tel projet. Peu connue sur la scène internationale, l’entreprise n’a pas encore prouvé sa solidité dans ce secteur stratégique. À ce stade, aucun rapport indépendant ne confirme la faisabilité du projet, ni la provenance des minerais nécessaires pour atteindre les 18 000 tonnes de capacité annuelle évoquées. Dans un marché où la crédibilité des acteurs est cruciale, ce silence pèse lourd.