Le Premier ministre sénégalais Ousmane Sonko a entamé, dimanche 1er juin, une visite officielle en Guinée, deuxième étape de sa tournée sous-régionale. Après Abidjan, Conakry accueille cette fois l’homme fort du gouvernement sénégalais pour une série d’entretiens de haut niveau avec les autorités guinéennes. Une rencontre avec le Premier ministre Bah Oury est prévue dans la matinée du 2 juin, suivie d’un tête-à-tête avec le président de la transition, Mamadi Doumbouya. Cette visite marque la volonté affichée de Sonko de normaliser et renforcer les liens bilatéraux avec tous les pays voisins, y compris ceux dirigés par des régimes militaires.
Ousmane Sonko est accompagné de responsables clés des ministères de la Pêche et des Infrastructures, deux secteurs stratégiques pour le Sénégal. En Guinée, les discussions porteront essentiellement sur les opportunités économiques qu’offre la croissance guinéenne, en particulier dans le secteur minier. Le mégaprojet de Simandou, qui suscite l’intérêt des investisseurs régionaux et internationaux, pourrait ouvrir des pistes de collaboration pour les entreprises sénégalaises. Sonko semble déterminé à inscrire ses déplacements dans une logique de bénéfices concrets pour l’économie sénégalaise.
La visite s’inscrit aussi dans un contexte de recomposition des relations bilatérales. Durant les mandats d’Alpha Condé et Macky Sall, Conakry et Dakar ont traversé une période marquée par des tensions diplomatiques, souvent nourries par des différends politiques et sécuritaires. Le changement de leadership dans les deux pays semble ouvrir une nouvelle phase. Le signe avant-coureur de ce réchauffement était déjà perceptible en 2023, lorsque Mamadi Doumbouya s’est déplacé à Dakar pour l’investiture de Bassirou Diomaye Faye.
Visite de Sonko à Conakry: Le Premier ministre sénégalais interpellé sur les disparitions en Guinée. #societecivgn https://t.co/MkMvaHUV71
— Alseny Farinta CAMARA (@fareinta) June 1, 2025
Mais cette visite suscite aussi des critiques. Des organisations sénégalaises de défense des droits humains, comme Afrikajom, Africtivistes et Tournons La Page, appellent Ousmane Sonko à s’exprimer sur la disparition d’activistes guinéens tels que Foniké Menguè, Billo Bah et du journaliste Habib Marouane Camara. Ces voix rappellent que la diplomatie ne peut ignorer totalement les atteintes aux droits fondamentaux dans la région. Toutefois, les proches du Premier ministre insistent sur une position de principe : s’abstenir de commenter les affaires intérieures des pays partenaires, afin de préserver un dialogue apaisé et productif.
Ce choix assumé d’un engagement diplomatique avec tous les régimes, y compris ceux issus de transitions militaires, témoigne d’un tournant. Ousmane Sonko, longtemps vu comme un opposant radical sur la scène sénégalaise, se positionne désormais en acteur pragmatique des relations régionales. Cette approche réaliste, centrée sur la coopération économique et le non-ingérence, rompt avec certaines habitudes diplomatiques de ses prédécesseurs et pourrait bien redéfinir les contours de l’influence sénégalaise en Afrique de l’Ouest.