L’Alliance des États du Sahel (AES) a dévoilé, ce lundi 9 juin, son hymne officiel intitulé « Sahel Benkan » (« L’Union du Sahel »). Présenté lors d’une cérémonie de levée des couleurs au Burkina Faso, en présence des chefs d’État des trois pays membres — le Mali, le Burkina Faso et le Niger — cet hymne incarne la volonté politique de marquer une rupture symbolique avec l’ordre ancien et d’unir les peuples autour d’une identité nouvelle.
Composé de trois couplets et d’un refrain, Sahel Benkan mêle exaltation patriotique, célébration des luttes passées et appel à la souveraineté économique. « Par le verbe et par les armes, brise les chaînes qui te tiennent », scandent les paroles, traduisant le message d’émancipation porté par les régimes militaires en place. Le refrain, martelé à deux reprises, insiste sur l’unité et la résilience : « Soldats, nous le sommes tous… pour que l’AES demeure un espace, un peuple, un destin ».
Cette mise en scène patriotique intervient alors que les trois États ont annoncé leur retrait de la CEDEAO et leur volonté de construire une confédération alternative. L’hymne sert donc autant à galvaniser les populations qu’à renforcer l’image d’une union politique et stratégique fondée sur une identité sahélienne assumée. Ce n’est pas un hasard si le texte fait référence aux « grands empires » et à un « esprit fertile de l’Afrique » : il s’agit d’inscrire l’AES dans une continuité historique et civilisationnelle.
En choisissant de doter l’AES d’un hymne propre, les autorités entendent donner de la consistance à une entité encore largement théorique. À l’heure où les alliances régionales sont en recomposition, Sahel Benkan se veut à la fois un acte de souveraineté culturelle et un instrument de légitimation. L’hymne pourrait être utilisé lors de futures manifestations officielles, d’événements diplomatiques ou de cérémonies militaires, renforçant ainsi la cohésion interne autour d’un imaginaire commun.
Au-delà de son aspect artistique, Sahel Benkan marque un tournant dans la manière dont les régimes de Bamako, Ouagadougou et Niamey cherchent à façonner une identité collective. En rupture avec les symboles hérités de l’époque postcoloniale et des structures ouest-africaines dominées par Abuja, l’AES parie sur la culture pour enraciner son projet. Si ce projet de confédération reste embryonnaire, l’adoption d’un hymne constitue un premier jalon dans la construction d’une narration propre à cette alliance militaire et politique.
Reste que cet hymne ne suscite pas l’adhésion unanime. Tandis que les partisans de l’AES saluent une initiative « historique », d’autres y voient une instrumentalisation de l’émotion patriotique pour faire oublier les difficultés économiques et sécuritaires persistantes. La charge idéologique du texte, évoquant la rupture avec « les chaînes » et la « reconquête des richesses », illustre un discours offensif, mais laisse en suspens la question de sa traduction concrète dans la gouvernance quotidienne des États membres.
Hymne de la Confédération des États du Sahel (AES)
“Sahel Benkan”
Couplet 1 :
Hommage au peuple du Sahel
Héritier des grands empires
Porteur d’un temps nouveau.
Qui annonce liberté et progrès
Sous l’étendard de combats épiques.
Couplet 2 :
Peuple de l’AES
Intrépide et souverain
Par le verbe et par les armes
Brise les chaînes qui te tiennent
Pour que tes richesses te reviennent
Et que scintille l’esprit fertile de l’Afrique.
Refrain :
Soldats, nous le sommes tous
Déterminés, résilients et unis
Pour que l’AES demeure
Un Espace, Un Peuple, Un Destin.
Couplet 3 :
Peuple de l’AES
Peuple d’Afrique, de ténacité
De sang et de sueur, Tu écriras l’histoire
Pour que fiers de leur passé
Tes enfants forgent le présent
Et bâtissent un monde meilleur.
Refrain :
Soldats, nous le sommes tous
Déterminés, résilients et unis
Pour que l’AES demeure
Un Espace, Un Peuple, Un Destin.
Peuple de l’AES !