Au Tchad, la Cour suprême est au centre d’une polémique de grande ampleur après deux semaines de grève des avocats. Ces derniers dénoncent un fonctionnement chaotique de la plus haute juridiction du pays, où des décisions sont rendues sans respecter les règles de procédure. Leurs accusations pointent des pratiques douteuses, notamment l’octroi ou le refus de sursis à la discrétion des juges, créant ainsi une zone de non-droit.
L’affaire qui a déclenché la grève des avocats est celle de la sextape qui avait secoué la ville d’Abéché il y a un an. Après des condamnations en première instance et en appel de plusieurs prévenus, les parties insatisfaites ont fait appel à la Cour suprême. Cependant, les avocats des parties civiles ont été stupéfaits de constater que la Cour suprême avait déjà rendu sa décision avant même de recevoir le dossier de l’affaire. Cette situation a été perçue comme une violation flagrante des règles de procédure judiciaire, ce qui a renforcé la défiance des avocats envers la Cour.
Ce dysfonctionnement n’est pas isolé. Il survient dans un contexte où les critiques envers le système judiciaire tchadien se multiplient. Le pays fait face à une pression croissante pour réformer ses institutions, en particulier la justice, souvent perçue comme inefficace et corrompue. La question du respect de l’état de droit et de l’indépendance de la justice est devenue un enjeu majeur, alors que des cas de maltraitance judiciaire et de décisions arbitraires sont fréquemment dénoncés par les avocats et les organisations de défense des droits de l’homme.
Les avocats ont exigé des réformes urgentes. Une réunion avec le ministre de la Justice et le président de la Cour suprême a eu lieu le 7 avril, au cours de laquelle des propositions ont été avancées. Ces réformes visent à améliorer la transparence et la rigueur du système judiciaire, mais aussi à rétablir la confiance des citoyens et des acteurs du droit dans la Cour suprême. Il reste à voir si ces propositions seront mises en œuvre de manière effective et quel impact elles auront sur l’avenir de la justice au Tchad.
D’autres révélations accablantes ont émergé lors de cette crise. Selon le bâtonnier de N’Djamena, plus de 20 cas similaires ont été recensés, où des décisions judiciaires ont été rendues sans respecter les procédures établies. Ces cas montrent l’ampleur des dérives au sein de la Cour suprême et soulignent l’urgence de réformes profondes pour garantir le bon fonctionnement du système judiciaire. Les avocats, désormais unis dans leur combat, ont promis de porter ces revendications devant l’assemblée générale de la profession.
Cette crise n’est pas seulement limitée à la Cour suprême. Elle révèle des failles dans tout le système judiciaire tchadien, où la transparence et l’impartialité sont souvent mises en question. Les avocats et les observateurs estiment qu’une réforme globale, englobant l’ensemble des juridictions du pays, est indispensable pour assurer un véritable état de droit. Le gouvernement et les institutions judiciaires devront désormais faire face à un défi de taille : restaurer la confiance dans un système judiciaire profondément fragilisé.