L’ex-maire de Dakar, Barthélémy Dias, a officiellement lancé son propre mouvement politique, baptisé « Sénégal Bi Ñu Bokk » – « Le Sénégal que nous partageons ». Une manière pour lui de rompre avec ses anciennes alliances, notamment avec Khalifa Sall, et de se positionner comme une figure incontournable de l’opposition dans un paysage politique sénégalais en recomposition.
L’annonce a été faite le 27 mai dernier dans une salle comble, où Dias, vêtu d’un boubou blanc, a présenté son initiative comme une réponse à la lassitude généralisée : « Un mouvement né de la fatigue d’attendre » et « du refus de courber l’échine », a-t-il déclaré. Après avoir perdu son mandat de député, puis celui de maire de Dakar fin 2023, l’ancien édile entend, à travers ce mouvement, retrouver une place centrale sur l’échiquier politique. Il veut incarner l’alternative face à une classe politique jugée défaillante.
Cette initiative marque surtout une rupture nette avec son ancien mentor Khalifa Sall, avec qui il a partagé des années de combat politique. Leur séparation, survenue il y a deux semaines, n’a rien d’anodin : elle signale la volonté de Dias de voler de ses propres ailes. Ce lancement intervient dans un contexte d’effervescence politique, où plusieurs figures tentent de redéfinir leurs rôles après l’élection de Bassirou Diomaye Faye.
Dans son discours, Barthélémy Dias a tendu la main à ceux qu’il appelle « les déçus du système » : jeunes chômeurs, pêcheurs délaissés, commerçants étranglés par la crise économique. Le message est clair : son mouvement veut transcender les appartenances partisanes classiques pour rassembler une population qui ne se reconnaît plus dans les partis traditionnels, ni dans la gouvernance actuelle, un an après l’arrivée du Pastef au pouvoir.
S’imposer comme une force crédible dans l’opposition ne sera pas simple. Barthélémy Dias entre en concurrence avec d’autres figures, anciennes ou émergentes, dans une opposition fragmentée et encore convalescente après la vague qui a porté le Pastef. L’absence de soutien officiel d’anciens alliés et l’instabilité des alliances rendent la tâche d’autant plus ardue. Mais pour certains analystes, sa personnalité combative et son ancrage dans les quartiers populaires peuvent lui donner un avantage.
La création de « Sénégal Bi Ñu Bokk » pourrait rebattre les cartes, à condition que Dias parvienne à mobiliser durablement. Son ambition affichée de rassembler « au-delà des clivages » demande une structuration solide et un discours porteur. Pour l’heure, c’est une déclaration d’intention. Le vrai test viendra avec les prochaines échéances locales ou nationales, où l’audience du mouvement sera mise à l’épreuve.