Le 22 février 2025, à Nairobi, une charte a été signée entre les Forces de soutien rapide (FSR) et 24 organisations, dont le Mouvement populaire de libération du Soudan-Nord (MPLS-N), dirigé par Abdelaziz el-Hilu. Cette alliance, qui pose les bases d’un gouvernement parallèle à celui de Port-Soudan, marque un tournant crucial pour le Soudan. Elle permet aux FSR de renforcer leur contrôle sur des territoires stratégiques et met en lumière les fractures croissantes du pays.
Les FSR, déjà maîtres de presque tous les États du Darfour, voient leur influence s’étendre, notamment grâce à leur partenariat avec Abdelaziz el-Hilu, dont les forces dominent le Kordofan et le Nil Bleu. Cette nouvelle alliance permet à ces groupes armés de contrôler plus de la moitié du Soudan, une vaste zone frontalière avec des pays clés comme la Libye, le Tchad, la République centrafricaine, le Soudan du Sud et l’Éthiopie. Cette prise de pouvoir sur des régions stratégiques accentue les tensions et la division interne du pays.
Le Soudan traverse une période d’instabilité intense depuis la chute de son président Omar el-Béchir en 2019. Les luttes de pouvoir entre diverses factions armées et politiques ont exacerbé les divisions, rendant difficile la mise en place d’un gouvernement unifié. Ce contexte fragile a permis l’émergence de groupes comme les FSR et le MPLS-N, qui contestent le pouvoir central et remettent en cause l’intégrité du Soudan. Le spectre de la division est d’autant plus pertinent lorsqu’on considère l’ampleur de l’extension de leur influence.
Les experts s’inquiètent de l’issue potentielle de cette situation, qui pourrait aboutir à un scénario similaire à celui de la Libye. Dans ce pays, un conflit armé prolongé a conduit à la formation de deux gouvernements rivaux, chacun soutenu par différentes puissances internationales et régionales. À la lumière de l’accord signé à Nairobi, certains craignent une fragmentation du Soudan en zones de contrôle rivales, avec des implications profondes pour la stabilité régionale.
L’ONU a exprimé ses préoccupations concernant la charte de Nairobi, soulignant qu’elle pourrait aggraver la crise en accentuant la fragmentation du Soudan. De son côté, la Ligue arabe a fermement condamné cette initiative, la considérant comme un facteur de division susceptible de mettre en péril l’unité nationale du Soudan. Cette inquiétude se reflète dans les dénonciations du gouvernement soudanais, qui perçoit la charte comme une menace directe à la souveraineté du pays, notamment en raison des risques d’ingérences étrangères et de l’armement accru des FSR.
Alors que la situation reste extrêmement volatile, plusieurs analystes prévoient que cette division géopolitique pourrait entraîner une guerre par procuration entre différentes puissances régionales, chacune cherchant à soutenir les factions qu’elle juge favorables à ses intérêts. L’avenir du Soudan demeure incertain, et les acteurs internationaux devront jouer un rôle clé pour éviter une escalade majeure de la violence et de la fragmentation. La stabilité de la région, et potentiellement de l’ensemble du Sahel, pourrait être sérieusement affectée par cette dynamique.