La province du Sud-Kivu, réputée pour sa richesse en or et en minerais 3T (étain, tungstène, tantale), fait face à une explosion de l’exploitation minière illégale. Selon le gouverneur Jean-Jacques Purusi, plus de 1600 entreprises, en majorité à capitaux chinois, opèrent sans permis, échappant ainsi à l’enregistrement et aux taxes. Cette situation met à mal les finances de l’État et prive la province de revenus considérables, alors même que des ressources minérales abondantes y sont exploitées.
Le gouverneur Purusi, lors d’une audition à l’Assemblée nationale française, a révélé des données alarmantes concernant l’impact de l’orpaillage illégal. Le Sud-Kivu, bien que potentiellement beaucoup plus riche que la province du Lualaba (grande source de cuivre et cobalt), ne génère que 500 000 dollars de recettes mensuelles, contre 53 millions de dollars pour le Lualaba. Selon Purusi, des milliers de kilos d’or quittent illégalement la province tous les six mois, principalement vers le Rwanda, où il est raffiné avant de repartir vers des marchés internationaux comme Dubaï, l’Arabie Saoudite ou la Chine.
Le phénomène de l’exploitation minière illégale au Sud-Kivu s’inscrit dans un contexte plus large de mauvaise gestion et de corruption. Le gouverneur Purusi pointe du doigt un système fiscal trop complexe avec plus de 1400 taxes, ainsi qu’une lourdeur administrative qui freine le bon fonctionnement du secteur. D’autres facteurs comme la corruption et l’inefficacité des autorités locales aggravent la situation. En outre, le conflit armé, exacerbée par la présence du M23, a contribué à déstabiliser la région, compliquant encore plus la gestion des ressources naturelles.
Face à cette situation désastreuse, des réformes ont été lancées pour rationaliser le secteur minier. Jean-Jacques Purusi évoque un plan de réforme ambitieux incluant la réduction des taxes, la mise en place d’un guichet unique pour les transactions commerciales, ainsi qu’un processus de bancarisation et de numérisation. Ces réformes semblent avoir porté leurs fruits, avec une augmentation significative des recettes minières, qui ont triplé en un mois, passant de 500 000 à 1,75 million de dollars. Si ces réformes sont menées à bien, les autorités estiment que les recettes mensuelles pourraient atteindre jusqu’à 25 millions de dollars.
La situation du Sud-Kivu ne se résume pas uniquement à un problème économique. La dégradation sécuritaire, avec l’occupation de zones stratégiques par le M23, a exacerbé la crise. Malgré les médiations entre le président congolais Félix Tshisekedi et son homologue rwandais Paul Kagame, les tensions persistent, entravant toute avancée vers un cessez-le-feu durable. Au-delà de la sécurité, la crise a des implications profondes sur les relations économiques et politiques, impliquant non seulement la RDC et le Rwanda, mais aussi d’autres acteurs internationaux intéressés par l’exploitation des ressources minières.
Le gouverneur du Sud-Kivu reste optimiste quant à la possibilité de redresser la situation, à condition que la paix soit rétablie et que les réformes se poursuivent. La fin du conflit pourrait en effet permettre à la province de tirer pleinement profit de ses ressources minières, offrant ainsi une opportunité de développement économique durable. Toutefois, la mise en œuvre complète de ces réformes et le retour de la stabilité dans la région restent des défis majeurs pour les autorités congolaises, et l’engagement des acteurs internationaux dans le processus de paix pourrait s’avérer crucial pour l’avenir de la province.