La Tanzanie vote ce mercredi 29 octobre pour une élection présidentielle qui constitue le premier véritable test électoral national pour la présidente Samia Suluhu Hassan. Arrivée au pouvoir en 2021 par succession constitutionnelle après le décès de John Magufuli, elle brigue pour la première fois un mandat direct devant les électeurs, dans un contexte marqué par une répression accrue contre l’opposition et des tensions politiques, particulièrement à Zanzibar.
Officiellement multipartite, avec dix-sept candidats en lice, la présidentielle offre en réalité peu d’alternative crédible au parti au pouvoir, Chama cha Mapinduzi (CCM). La campagne de la cheffe de l’État s’est articulée autour des thèmes de stabilité, de continuité et d’unité. Cependant, cette consultation est privée de ses principaux challengers. Tundu Lissu, figure de proue de l’opposition, est incarcéré pour “haute trahison” et n’a pu faire campagne. Un autre candidat d’importance, Luhaga Mpina de l’ACT-Wazalendo, a été disqualifié par les autorités électorales pour des motifs que son parti qualifie de politiques.
Le CCM gouverne la Tanzanie sans interruption depuis l’indépendance en 1961. Samia Suluhu Hassan avait initialement incarné une ouverture après l’autoritarisme musclé de son prédécesseur, John Magufuli, surnommé “le Bulldozer”. Pourtant, à l’approche de ce scrutin, son gouvernement a opéré un net resserrement de l’espace démocratique. Les observateurs notent que la répression sous son mandat s’est intensifiée, contredisant les espoirs de libéralisation politique qu’elle avait initialement suscités.
L’enjeu pour la présidente est de transformer sa légitimité constitutionnelle héritée en un mandat personnel pleinement validé par les urnes. Une victoire sans contestation lui permettrait d’affirmer son autorité propre au sein du CCM et de poursuivre ses projets économiques. Cependant, un scrutin entaché de controverses et perçu comme injuste par une frange de la population risque d’alimenter un mécontentement durable et des tensions sociales post-électorales. La crédibilité du processus à Zanzibar sera un indicateur clé de l’acceptation générale des résultats.
La situation à Zanzibar, archipel semi-autonome et foyer historique de contestation, cristallise les inquiétudes. L’opposition y dénonce des irrégularités massives lors du vote anticipé, affirmant que près de 50 000 bulletins ont été déposés avant le jour du scrutin, contre 7 000 attendus. Elle y voit une manœuvre pour “remplir les urnes” en faveur du CCM. Un rejet du processus dans l’archipel pourrait déclencher des mobilisations de protestation et remettre en cause la stabilité de l’Union tanzanienne.
Le climat général est décrit comme pesant par les organisations de défense des droits humains. Amnesty International rapporte un environnement de peur, avec des arrestations d’opposants, des pressions sur les médias et des disparitions forcées. La police a promis une “sécurité maximale” tout en menaçant de sévir contre toute perturbation. Des incidents, incluant des tirs à balles réelles et des affrontements, ont été rapportés, notamment dans la capitale économique, Dar es Salam. Ces violences, couplées à la suspension inédite des services de bus, illustrent la défiance et les craintes qui entourent ce scrutin.



