En décembre dernier, la Banque africaine de développement (BAD) a lancé une alerte concernant l’application du Mécanisme d’ajustement carbone aux frontières (MACF) mis en place par l’Union européenne. La BAD a demandé que les pays africains soient exemptés de ce dispositif, car il pourrait entraîner des pertes annuelles estimées à près de 25 milliards de dollars, compromettant la capacité des nations africaines à monétiser leurs exportations à valeur ajoutée, notamment les hydrocarbures.
Le MACF, qui doit entrer en vigueur en 2026, imposera une taxe sur les importations en fonction de leur empreinte carbone, augmentant ainsi les coûts pour les produits provenant de pays à forte intensité de carbone. L’Organisation des producteurs de pétrole africains (APPO) a exprimé une vive opposition à cette initiative et a appelé l’Union européenne à instaurer un moratoire pour les pays africains. Le Dr Omar Farouk Ibrahim, secrétaire général de l’APPO, a souligné que cette mesure pourrait avoir des effets économiques dévastateurs sur la croissance du continent, en particulier dans le secteur de l’énergie.
Cette opposition s’explique par la dépendance de nombreuses économies africaines à la monétisation de leurs ressources énergétiques, comme le pétrole et le gaz. Avec le MACF, l’UE cherche à encourager la transition énergétique mondiale en dissuadant l’importation de produits à forte empreinte carbone. Cependant, pour les pays africains qui comptent sur l’exportation de ces ressources pour financer leur développement, une telle mesure risque de ralentir la croissance économique et de réduire les recettes budgétaires.
Plusieurs perspectives sont envisagées pour faire face à cette situation. Certains experts suggèrent que les pays africains mettent en place des systèmes de tarification du carbone afin d’adapter leurs industries aux normes internationales et de minimiser les pénalités associées au MACF. D’autres préconisent de renforcer les investissements dans les énergies renouvelables afin de diversifier les sources d’énergie et de réduire la dépendance aux combustibles fossiles, ce qui pourrait aider à diminuer l’empreinte carbone des exportations africaines et atténuer l’impact des nouvelles régulations européennes.
En parallèle, de nombreux dirigeants africains insistent sur la nécessité d’une approche plus équilibrée et équitable de la part des partenaires internationaux. Pour le Dr Ibrahim, « l’Afrique ne peut pas se développer sans combustibles fossiles », affirmant qu’une politique juste doit prendre en compte les spécificités et les défis propres au continent, notamment la nécessité de garantir un développement durable tout en réduisant la pauvreté et en améliorant les infrastructures.
Bien que la mise en œuvre du MACF semble inévitable, il est essentiel que les pays africains développent des stratégies pour en atténuer les effets. Cela pourrait inclure la négociation d’un moratoire, la mise en place de mécanismes de tarification du carbone, ou encore une diversification énergétique accrue. L’enjeu principal est de minimiser l’impact économique de cette réglementation tout en favorisant un développement équilibré et respectueux de l’environnement.