L’ex-Premier ministre tchadien Succès Masra a été formellement inculpé par un juge d’instruction et placé en détention provisoire. Il est accusé d’avoir incité au massacre de 42 personnes à Mandakao, une localité située dans le sud du Tchad, la semaine dernière. Son arrestation a immédiatement provoqué une vague de réactions, notamment dans les rangs de l’opposition.
Selon les autorités judiciaires, c’est un enregistrement audio datant de 2023 qui aurait motivé cette décision. Dans ce message, Succès Masra appelait les populations du sud du pays à se défendre contre les violences alors en cours. Pour le juge, ce message aurait alimenté des tensions qui auraient dégénéré deux ans plus tard, menant au massacre de Mandakao. La thèse est aujourd’hui reprise et défendue par le gouvernement en place.
La défense de l’ancien Premier ministre rejette en bloc ces accusations. Pour le collectif d’avocats de Masra, les faits ne tiennent pas. Ils soulignent que l’audio incriminé a été remis à la police judiciaire le 6 mai, soit près de dix jours avant les événements tragiques. Ils dénoncent une instrumentalisation de la justice et estiment que le juge a cédé à des pressions venues « du sommet de l’État ».
Placé en détention provisoire, Succès Masra pourrait rester derrière les barreaux pendant toute la durée de l’enquête, qui peut légalement s’étendre jusqu’à un an. Ses avocats ont d’ores et déjà annoncé leur intention de demander une mise en liberté provisoire. De son côté, le parti Les Transformateurs, qu’il dirige, conteste la légalité de sa détention et exige sa libération immédiate.
Cette affaire intervient dans un contexte politique déjà tendu au Tchad, où l’opposition dénonce régulièrement les manœuvres du pouvoir pour museler ses adversaires. L’arrestation de Masra, figure montante de la contestation, risque de raviver les tensions entre le gouvernement et les mouvements politiques d’opposition, déjà fragilisés par une répression continue.
Au-delà du cas individuel de Succès Masra, c’est aussi la capacité de la justice tchadienne à agir de manière indépendante qui est mise à l’épreuve. L’évolution de cette affaire sera scrutée de près tant par les défenseurs des droits humains que par la communauté internationale, dans un pays où l’équilibre institutionnel reste précaire.