Le Togo s’apprête à écrire une nouvelle page de son histoire politique avec l’élection, le 2 février 2025, des premiers sénateurs de la République. Ce scrutin au suffrage universel indirect marque l’aboutissement des réformes institutionnelles amorcées par l’adoption de la nouvelle Constitution en mai 2024, qui consacre officiellement le passage à la Ve République.
Selon les textes publiés au Journal officiel, le futur Sénat sera composé de 61 membres. Parmi eux, 41 seront élus pour un mandat de six ans par des grands électeurs issus des conseils régionaux et locaux, tandis que les 20 autres seront directement nommés par le président Faure Gnassingbé. Cette chambre législative tiendra deux sessions ordinaires par an, en avril et en octobre, et vise à renforcer le cadre institutionnel du pays.
L’instauration de cette nouvelle institution intervient dans un climat politique tendu, marqué par les critiques de l’opposition sur les récents scrutins législatifs. Lors de ces élections, le parti au pouvoir, UNIR, a remporté 108 des 113 sièges de députés, alimentant des accusations de manque de transparence. La domination d’UNIR, qui contrôle plus de 90 % des grands électeurs appelés à choisir les sénateurs, suscite des interrogations quant à l’équité du processus.
Face à cette situation, plusieurs partis d’opposition, dont le FDR, l’ANC et la DMP, s’interrogent sur l’opportunité de participer aux sénatoriales. Leurs dirigeants craignent que ce scrutin ne soit qu’une formalité permettant au pouvoir de consolider son contrôle sur les institutions. Le front “Touche pas à ma constitution”, qui s’était opposé aux réformes constitutionnelles, dénonce déjà une mascarade électorale éloignée des aspirations populaires.
Au-delà des débats politiques, l’enjeu principal reste la représentativité réelle de cette nouvelle chambre haute. Les critères d’éligibilité, qui exigent notamment une résidence au Togo depuis au moins six mois et un âge minimum de 35 ans, pourraient limiter la diversité des candidatures. Par ailleurs, la désignation directe d’un tiers des sénateurs par le président soulève des questions sur l’équilibre des pouvoirs.
Malgré les critiques, la mise en place du Sénat symbolise un pas important vers la consolidation des institutions démocratiques prévues par la nouvelle Constitution. Reste à savoir si cette initiative saura convaincre la population et apaiser les tensions politiques, ou si elle renforcera les divisions entre le pouvoir et l’opposition dans ce pays en quête de stabilité.