La campagne officielle pour l’élection présidentielle guinéenne du 28 décembre se caractérise par un calme surprenant, une semaine après son lancement. Aucun meeting d’envergure n’a encore été organisé, ni par le candidat favori, le général Mamadi Doumbouya, ni par les huit autres prétendants, laissant planer une impression de vide et de manque d’engouement.
En l’absence de grands rassemblements, la bataille se joue pour l’instant sur le petit écran. La télévision nationale diffuse des clips de campagne, dont celui du président de la transition, Mamadi Doumbouya. Vêtu d’un T-shirt aux couleurs de son mouvement, le Génération pour la modernité et le développement (GMD), il y met en avant ses réalisations, comme le projet minier de Simandou ou des infrastructures routières. Cette communication contrôlée contraste avec l’effervescence habituelle des périodes électorales.
Cette atonie s’inscrit dans un contexte politique profondément marqué par le coup d’État de septembre 2021 et la transition militaire qui a suivi. Les principaux partis d’opposition, comme l’UFDG de Cellou Dalein Diallo, l’UFR de Sidya Touré ou le RPG d’Alpha Condé, boycottent le processus, le jugeant biaisé en faveur du pouvoir en place. Leur absence du scrutin prive la campagne d’une confrontation politique structurante et d’une mobilisation de masse, expliquant en grande partie le calme actuel.
Les perspectives immédiates laissent entrevoir une possible intensification des activités la semaine prochaine, à l’approche de la clôture de la campagne fixée au 26 décembre. Cependant, l’enjeu dépasse le simple calendrier. L’élection, si elle est organisée dans ces conditions, pourrait acter la transformation d’un chef de junte en président élu, mais sans résoudre la crise de légitimité qui mine le pays depuis trois ans. Le risque d’une contestation post-électorale et d’un durcissement de la fracture politique demeure élevé.
Face à ce vide, certains candidats tentent de se positionner. L’analyste politique Kabinet Fofana note ainsi que Abdoulaye Yéro Baldé, du Front démocratique de Guinée (Frondeg) et ancien ministre d’Alpha Condé, cherche à capter l’électorat des partis boycottant le scrutin. Sa préparation, illustrée par une tournée médiatique en France, en fait un challenger notable, mais sa capacité à mobiliser sans le soutien des appareils politiques traditionnels reste une inconnue majeure.
Pour les observateurs, cette campagne atone interroge la nature même du scrutin. Elle révèle moins un consensus qu’une résignation face à un processus dont l’issue semble écrite d’avance. L’attention se porte désormais sur la participation le jour du vote, qui sera le premier indicateur du degré d’adhésion ou de rejet de l’électorat envers cette transition électorale. La crédibilité du résultat, tant sur le plan national qu’international, en dépendra largement.



