Le neuvième congrès panafricain s’est ouvert ce 8 décembre au Palais des congrès de Lomé, avec l’ambition affichée de redéfinir le rôle de l’Afrique dans un ordre multilatéral en mutation. Organisé avec l’Union africaine, l’événement mobilise plusieurs voix du continent et de la diaspora, mais il suscite déjà de vives critiques de l’opposition togolaise.
Le thème central, consacré au renouveau du panafricanisme, place la réforme des institutions internationales au cœur des discussions. Les organisateurs veulent interroger la place réelle de l’Afrique dans les mécanismes de gouvernance mondiale et aborder la question des réparations liées aux injustices historiques. Le projet est porté depuis plus de deux ans par le ministre togolais des Affaires étrangères, Robert Dussey, qui en fait un instrument de rayonnement diplomatique.
Ce congrès s’inscrit dans une longue histoire. Le premier rassemblement panafricain remonte à plus d’un siècle, tandis que le dernier s’est tenu en 2014 à Accra. L’édition de Lomé arrive toutefois dans un climat politique interne tendu. Le Togo traverse une phase de crispation marquée par l’adoption d’une nouvelle Constitution contestée et par des accusations récurrentes de restriction des libertés publiques.
Parmi les participants annoncés figurent des universitaires, des représentants de la diaspora, le ministre angolais de la Culture ou encore l’économiste togolais Kako Nubukpo. Plusieurs figures publiques très suivies par la jeunesse, comme Nathalie Yamb ou Franklin Nyamsi, sont attendues. L’activiste Kemi Seba refuse en revanche d’y prendre part, accusant le gouvernement togolais d’opprimer sa population. Ces positions divergentes annoncent des débats où l’idéal panafricain risque de se heurter aux réalités politiques nationales.
Des voix critiques s’élèvent au sein de l’opposition togolaise, qui accuse le pouvoir de détourner un discours panafricaniste devenu populaire auprès des jeunes pour renforcer sa légitimité interne. Pour ces acteurs, le congrès ne peut occulter les tensions sociales et les revendications démocratiques qui persistent dans le pays. Le mouvement M66, né récemment sur les réseaux sociaux, appelle d’ailleurs à des mobilisations contre la nouvelle Constitution et pour la libération des prisonniers politiques.
La tenue du congrès offre au Togo une vitrine diplomatique, mais elle expose aussi les contradictions d’un État qui cherche à incarner une vision africaine commune tout en restant confronté à ses propres crises institutionnelles. Les débats de Lomé permettront peut être de relancer une réflexion panafricaine, mais ils illustrent déjà la distance qui sépare les aspirations du continent des réalités politiques locales.



