Ramaphosa veut relancer le contrat social sud-africain par un dialogue national Face aux tensions, l’Afrique du Sud mise sur la parole citoyenne Un dialogue national pour panser les fractures de la démocratie sud-africaine Ramaphosa lance un dialogue national pour refonder le lien entre l’État et les citoyens Mardi 10 juin, dans une allocution télévisée, le président sud-africain Cyril Ramaphosa a annoncé l’ouverture d’un grand dialogue national, destiné à retisser le lien entre institutions et société. Une première convention se tiendra le 15 août 2025 et réunira des représentants de la société civile. Une seconde phase est prévue début 2026, avec une nouvelle convention qui fera le point sur les échanges et les propositions formulées par les citoyens au cours des mois précédents. Le chef de l’État a présenté cette initiative comme une réponse aux appels croissants au dialogue à travers le pays. Dans son message, il a reconnu les avancées démocratiques réalisées depuis 1994, mais a aussi insisté sur les fractures persistantes : pauvreté, chômage endémique, inégalités sociales, criminalité, violences sexistes et corruption. Pour Ramaphosa, il est urgent de « rouvrir un espace collectif de discussion » afin de construire des réponses communes à ces défis structurels. Trente ans après l’apartheid, une démocratie en mal de souffle L’appel au dialogue intervient dans un contexte politique tendu. Trente ans après la fin de l’apartheid, les promesses de la démocratie restent largement inachevées pour une grande partie de la population. L’Afrique du Sud affiche l’un des taux de chômage les plus élevés du continent, en particulier chez les jeunes. Les inégalités raciales et économiques persistent, nourrissant un sentiment d’abandon et de défiance envers les institutions. Ce climat de défiance a été exacerbé par la baisse continue du soutien électoral à l’ANC, le parti au pouvoir depuis 1994. Lors des dernières élections générales, le parti a perdu la majorité absolue, obligeant Ramaphosa à envisager des alliances pour gouverner. C’est aussi dans ce contexte de repositionnement politique que s’inscrit l’initiative du dialogue national, perçue par certains analystes comme une tentative de légitimation du pouvoir. Une démarche à hauts risques politiques Si cette dynamique participative peut être salutaire, elle comporte aussi des risques. La réussite d’un tel dialogue dépendra de sa capacité à inclure réellement toutes les voix du pays : syndicats, jeunes, communautés rurales, femmes, minorités linguistiques, etc. Le danger serait que cette démarche soit perçue comme un simple exercice de communication, sans traduction concrète dans les politiques publiques. Par ailleurs, les attentes de la population sont immenses. Nombreux sont ceux qui, lassés par les promesses non tenues, réclament des mesures immédiates sur le coût de la vie, l’accès à l’emploi, la sécurité ou encore la lutte contre la corruption. Si le dialogue national ne débouche pas sur des engagements clairs, le risque de désillusion pourrait affaiblir encore davantage la légitimité du pouvoir. Un test pour la maturité démocratique du pays Ce processus de dialogue sera donc un test. Un test pour la capacité du gouvernement à écouter réellement. Un test pour les institutions à se réformer. Et un test pour les citoyens eux-mêmes, appelés à s’engager dans un processus participatif qui pourrait redéfinir les priorités nationales. Dans un pays où l’expression politique a longtemps été confisquée, ce retour à la parole publique pourrait aussi raviver l’énergie démocratique qui a porté la fin de l’apartheid.
Mardi 10 juin, dans une allocution télévisée, le président sud-africain Cyril Ramaphosa a annoncé l’ouverture d’un grand dialogue national, destiné à retisser le lien entre ... Lire la suite