L’ambassadeur français en Roumanie, Nicolas Warnery, a dénoncé une campagne hostile orchestrée par l’extrême droite roumaine, l’accusant à tort d’ingérence dans l’élection présidentielle. Des accusations alimentées par une vaste opération de désinformation sur les réseaux sociaux, où Paris est devenue la cible privilégiée. Ces attaques, selon Warnery, servent les intérêts de Moscou, dans un contexte tendu de guerre en Ukraine.
Depuis le premier tour de l’élection présidentielle roumaine, tenu le 24 novembre, la France est pointée du doigt pour ses positions supposées en faveur de certains candidats. L’émergence du candidat d’extrême droite Calin Georgescu, boostée par une campagne virale sur TikTok, a coïncidé avec des accusations d’ingérence, notamment après l’annulation du scrutin par la Cour constitutionnelle. Emmanuel Macron a publiquement évoqué, début janvier, des manipulations électorales attribuées à la Russie, alimentant la crispation des milieux souverainistes roumains.
La présence militaire française en Roumanie dans le cadre de l’OTAN, la visite d’un ministre français à Bucarest en pleine crise, ou encore les déplacements du diplomate dans des institutions roumaines ont tous été interprétés comme des tentatives d’influencer le processus électoral. Même des actions ordinaires de coopération ont été détournées dans le discours public, amplifiées par les réseaux sociaux et par des figures politiques comme George Simion, adversaire du candidat pro-européen Nicusor Dan, soutenu par Paris.
Les tensions n’ont pas diminué après la défaite du candidat souverainiste, dont les recours ont été rejetés. Des rumeurs infondées évoquant un coup d’État préparé par des soldats français ou une tentative de manipulation des électeurs par Telegram ont continué d’alimenter la méfiance. Le fondateur de l’application, Pavel Durov, a même affirmé sans preuve que la France lui aurait demandé de censurer des voix conservatrices, ce que Paris a fermement démenti.
Pour l’ambassadeur, la stratégie est claire : affaiblir la position de la France, perçue comme un soutien majeur de l’Ukraine, en exploitant les divisions internes roumaines. La campagne de Calin Georgescu et l’intensité des accusations semblent s’inscrire dans une dynamique plus large de déstabilisation. Cette situation soulève des inquiétudes sur la résilience des démocraties européennes face aux menaces hybrides mêlant désinformation, manipulation électorale et cyberinfluence.
La virulence du discours anti-français, relayée jusque sur les plateaux télévisés en France par des responsables politiques roumains, marque une rupture avec la tradition de proximité entre les deux pays. La Roumanie, historiquement francophile, voit aujourd’hui son opinion publique se diviser autour de récits antagonistes, entre adhésion européenne et repli identitaire. Une évolution préoccupante pour Paris, qui observe avec inquiétude l’effritement de son image dans cette région stratégique de l’Est européen.