Le chef de l’Etat Camerounais Paul Biya, vient de retirer le monopole de l’importation du carburant à la Société nationale de raffinage (Sonara), l’unique raffinerie du Cameroun qui est actuellement en restructuration, a-t-on appris dans une lettre adressée ce 14 décembre 2023 au ministre en charge de l’Energie par le secrétaire général de la présidence de la République (SGPR) Ferdinand Ngoh Ngoh. « J’ai l’honneur de vous faire connaitre qu’il (Paul Biya ndlr) vous prescrit de procéder à la libéralisation des importations des produits pétroliers », peut-on lire dans cette lettre. Il instruit à cet effet le ministère de l’Energie, de réhabiliter la Caisse de stabilisation des prix des hydrocarbures (CSPH) « dans la fonction de pilotage du processus d’attribution des quotas aux importateurs majeurs du secteur, présentant les profils techniques et financiers leur permettant de procéder immédiatement aux importations », poursuit-il. Avec cette libéralisation, la Sonara devrait perdre les 80% des parts de marché qui lui étaient jusqu’ici réservés dans les importations des produits pétroliers.
Par conséquent, le président de la République donne désormais le feu vert aux marketeurs présents dans ce secteur, « d’acquérir les produits pétroliers directement auprès des fournisseurs de leur choix ». Une décision qui vient donc annuler le mécanisme d’approvisionnement du marché mis en place par le gouvernement en 2020. Un mécanisme qui donnait au gouvernement l’exclusivité du recrutement par appel d’offres international, des traders devant vendre aux marketeurs et importateurs locaux les produits pétroliers en vue d’approvisionner les consommateurs.
Mais, même si l’importation des produits pétroliers est libéralisée, il faudrait tout de même pour les acteurs du secteur, respecter certaines règles. Raison pour laquelle le ministère en charge de l’Energie sera chargé de « veiller à ce que les entreprises chargées de l’importation et de la distribution des différents produits respectent les prix homologués par le gouvernement ». Quant au contrôle-qualité des produits importés, il est confié à la société Hydrac (Hydrocarbures, analyses et contrôles), filiale de la Société nationale des hydrocarbures (SNH), et la Sonara pour sa part se chargera de la « confirmation des analyses réalisés par la société Hydrac », indique le SGPR, porteur de l’instruction présidentielle.
Cette décision du président de la République est prise dans un contexte où l’approvisionnement des produits pétroliers connait des perturbations au Cameroun. Avec notamment une pénurie qui a touché plusieurs villes du pays ces derniers jours. Des perturbations devenues récurrentes dans le pays depuis que les activités de raffinage sont à l’arrêt en raison de l’incendie qui a ravagé les installations de la Sonara en mai 2019 à Limbe (Sud-Ouest). Une situation qui oblige le Cameroun à importer tous les carburants qu’il consomme. Par ailleurs, à cause de cet incident, la Sonara peine à honorer ses engagements notamment auprès des traders et fournisseurs de pétrole brut et des produits pétroliers finis auprès de qui elle traine des impayés. A en croire la Caisse autonome d’amortissement (CAA) dans sa dernière note de conjoncture mensuelle de la dette publique du Cameroun, le raffineur trainait à fin septembre 2023, une créance de 425,5 milliards de FCFA auprès de ses fournisseurs étrangers.
Pascale Tchakounté