À quelques semaines de la clôture des candidatures pour la présidentielle ivoirienne d’octobre, une fracture apparaît au sein du Parti des peuples africains – Côte d’Ivoire (PPA-CI). Dans une lettre ouverte adressée à Laurent Gbagbo, Ahoua Don Mello, vice-président du parti, plaide pour une diversification des candidatures en prévision d’un éventuel rejet de celle du fondateur du parti, toujours frappé d’inéligibilité.
Dans sa lettre, Ahoua Don Mello propose qu’un petit groupe de cadres du PPA-CI dépose une candidature alternative, sans remettre en cause le leadership de Gbagbo. Il ne s’agit pas, selon lui, de le remplacer, mais de « candidatures de précaution » qui deviendraient automatiquement nulles si une issue politique permettait le retour de Gbagbo dans la course. Don Mello recommande par ailleurs la tenue d’une convention extraordinaire pour départager les éventuels candidats autorisés par le Conseil constitutionnel.
Depuis 2020, Laurent Gbagbo est radié des listes électorales à la suite de sa condamnation à 20 ans de prison dans l’affaire dite de la « casse de la BCEAO », malgré son acquittement par la Cour pénale internationale. Bien que le PPA-CI continue de le désigner comme unique candidat, aucune avancée juridique ne garantit à ce jour qu’il pourra effectivement se présenter. C’est cette incertitude que Don Mello tente de pallier, au risque de bousculer la ligne officielle du parti.
La réaction du parti ne s’est pas fait attendre. Dans un communiqué publié quelques heures après la diffusion de la lettre, la direction du PPA-CI a exprimé sa « surprise », affirmant que le document n’avait « jamais été enregistré ni soumis aux instances compétentes ». Le communiqué rappelle que Gbagbo demeure le seul et unique candidat du parti, fermant ainsi la porte à toute initiative parallèle.
La sortie de Don Mello met en lumière un débat de fond au sein du PPA-CI : comment concilier fidélité à Gbagbo avec les exigences pragmatiques d’une échéance électorale majeure ? Certains cadres s’inquiètent d’un scénario où l’inéligibilité du fondateur conduirait à un boycott ou à une marginalisation politique durable. Pour Don Mello, ne pas se préparer à cette éventualité reviendrait à fragiliser le parti face à ses concurrents.
Le calendrier électoral impose une décision rapide. Si aucune issue juridique n’est trouvée dans les prochaines semaines, le PPA-CI pourrait se retrouver sans candidat. À moins d’un revirement, le refus d’explorer d’autres options que Gbagbo risque d’ouvrir la voie à une crise interne plus profonde. Le PPA-CI, en se refermant sur une candidature incertaine, prend le risque de se retrouver absent de l’élection, alors même que l’opposition cherche à se repositionner sur la scène politique.