Les interactions virtuelles et la dématérialisation des données représentent la majeure partie des gains d’efficacité qui pourraient être générés par une utilisation massive des technologies numériques dans les établissements de santé africains.
En utilisant massivement des outils de santé numériques comme les téléconsultations, les dossiers médicaux électroniques et applications mobiles de gestion des maladies chroniques, les systèmes sanitaires africains pourraient réaliser des gains d’efficacité allant jusqu’à 15 % des dépenses totales d’ici à 2030, selon un rapport publié le 10 mars par le cabinet de conseil McKinsey & Compagny.
Pour tenter de quantifier les gains d’efficacité potentiels qui pourraient être générés par une digitalisation accrue des soins de santé sur le continent, McKinsey a d’abord identifié 24 outils de santé numériques utilisables dans les établissements sanitaires dans trois pays africains qui ont accaparé 85 % des financements levés par les start-up opérant dans le domaine de la santé (Healthtech) en Afrique en 2021 : l’Afrique du Sud, le Nigeria et le Kenya.
Définis comme étant des produits et des services basés sur les technologies numériques destinés aux patients, au personnel de santé, aux autorités sanitaires, aux entreprises pharmaceutiques et aux régulateurs, ces outils de santé numériques ont été classés en six grandes catégories : les interactions virtuelles (telles que les plateformes de téléconsultation), la dématérialisation des données (comme les dossiers médicaux électroniques), l’autogestion des patients (les applications mobiles pour la gestion des maladies chroniques par exemple) ; le libre-service pour les patients (comme les plateformes de prise de rendez-vous en ligne et les systèmes de réservation pour les cliniques) ; les systèmes d’aide à la décision (à l’instar les systèmes de gestion des flux de patients dans les hôpitaux); et l’automatisation des flux de travail (tels que les systèmes de suivi des équipements médicaux utilisant l’identification par radiofréquence et les robots dédiés à la logistique hospitalière).
79 cas d’utilisation de ces 24 outils de santé numérique ont été pris en considération. Pour chacun des cas d’utilisation, le gain d’efficacité potentiel a calculé pour la partie correspondante des dépenses de santé d’ici 2030 dans les trois pays étudiés.
Ces prévisions de dépenses de santé se basent sur deux scénarios : un scénario prudent qui prévoit le maintien du rythme de croissance annuel moyen des dépenses de santé, enregistré entre 2010 et 2019, et un scénario optimiste qui suppose que les dépenses de santé vont croître au rythme requis pour atteindre les objectifs de développement durable des Nations Unies d’ici 2030.
Le rapport conclut que les gains d’efficacité qui pourraient être réalisés grâce à la généralisation des 24 outils de santé numériques sélectionnés, sans compromettre la qualité de soins, varient d’un pays à l’autre et en fonction des deux différents scénarios prévisionnels des dépenses de santé.
Un accès plus large à des soins de meilleure qualité
D’ici 2030, l’adoption généralisée des outils numériques sélectionnés pourrait réduire les dépenses de santé de 400 millions à 2,5 milliards de dollars au Kenya (4% des dépenses prévues dans le scénario prudent, jusqu’à 14 % des dépenses prévues dans le scénario optimiste).
Au Nigeria, les gains d’efficacité qui pourraient être générés par la digitalisation des soins de santé vont de 700 millions à 3,3 milliards de dollars (4 à 10 % du total des dépenses de santé prévues), contre 1,9 milliard à 11 milliards de dollars en Afrique du Sud (6 à 15 % du total des dépenses de santé prévues).
Le rapport souligne dans ce cadre que les interactions virtuelles représentent environ 43 % des gains d’efficacité potentiels d’ici 2030 au Kenya (jusqu’à 1,1 milliard de dollars), 35 % au Nigeria (jusqu’à 1,2 milliard de dollars) et 39 % en Afrique du Sud (jusqu’à 4,3 milliards de dollars).
La dématérialisation des données représente 30 % des gains d’efficacité potentiels au Kenya (jusqu’à 700 millions de dollars), 26 % au Nigeria (jusqu’à 900 millions de dollars) et 30 % en Afrique du Sud (jusqu’à 3,3 milliards de dollars).
L’autogestion des patients représente, quant à elle, 4 % des gains d’efficacité potentiels au Kenya (jusqu’à 100 millions de dollars), 6 % au Nigeria (jusqu’à 200 millions de dollars) et 5% en Afrique du Sud (jusqu’à 500 millions de dollars).
McKinsey & Compagny précise par ailleurs que les ressources financières provenant des gains d’efficacité générés par les outils de santé numériques pourraient être réinvestis dans d’autres domaines hautement prioritaires afin d’améliorer l’accès aux soins, la disponibilité des équipements de pointe et les performances globales des systèmes de santé africains.
Le cabinet de conseil note également que ces outils de santé numériques sont susceptibles de permettre un accès plus large à des soins de meilleure qualité sur le continent. Ils pourraient en effet améliorer l’accès aux services de santé essentiels, en particulier pour les populations difficiles à atteindre, les femmes, les réfugiés, les personnes handicapées et les ménages à faibles revenus.
En outre, un meilleur accès aux données des patients pourrait aider les prestataires de soins à poser des diagnostics plus précis et à adapter plus efficacement les interventions pour prévenir ou traiter les maladies.
Les outils numériques pourraient également faciliter le respect des plans de traitement par les patients, renforcer la résilience des systèmes de santé africains en améliorant leur capacité à identifier les urgences sanitaires et à limiter les impacts négatifs de la pénurie des professionnels de santé, en particulier dans les zones rurales.
Agence Ecofin