En Érythrée, sept prêtres chrétiens sont incarcérés depuis plus de vingt ans sans inculpation ni procès. À l’occasion de la Journée internationale de commémoration des victimes de violences liées à la religion, l’ONG Portes Ouvertes alerte sur leur sort. Ce cas illustre l’extrême répression exercée par le régime d’Asmara contre toute liberté de culte, dans un pays souvent comparé à la « Corée du Nord de l’Afrique ».
Selon David Haemerlin, directeur général de Portes Ouvertes France, ces arrestations démontrent que la moindre dissidence est étouffée. Les autorités érythréennes surveillent étroitement sermons et activités des communautés religieuses, même celles reconnues officiellement. L’Érythrée n’autorise que quatre religions — trois chrétiennes et l’islam sunnite — mais impose des restrictions sévères à toutes, y compris à l’Église orthodoxe dont certains prêtres emprisonnés sont issus.
Depuis l’indépendance en 1993, le régime du président Issayas Afeworki a bâti un système de contrôle autoritaire. Les libertés politiques et religieuses y sont réduites à leur minimum. Human Rights Watch classe régulièrement l’Érythrée parmi les pays les plus répressifs au monde. La constitution, adoptée en 1997 et censée garantir la liberté de religion, n’a jamais été appliquée. Dans ce contexte, l’arrestation de religieux, même issus de confessions « autorisées », s’inscrit dans une logique de neutralisation de toute influence autonome face à l’État.
Les conditions d’emprisonnement sont décrites comme inhumaines. Les détenus sont parfois enfermés dans des containers métalliques exposés au soleil du désert, pratique assimilée à de la torture. Le révérend Kidane Veld, diabétique, a déjà dû être hospitalisé à plusieurs reprises en raison de complications liées à ces conditions. Portes Ouvertes appelle à leur libération immédiate, mais les chances d’évolution restent faibles, le régime refusant tout geste perçu comme une concession.
En France, l’ONG propose au public de signer une lettre adressée à l’ambassade d’Érythrée pour exiger le respect de la liberté religieuse. Ces initiatives symboliques visent à maintenir l’attention internationale sur le cas des sept prêtres. Toutefois, l’efficacité de telles pressions reste limitée, l’Érythrée s’étant historiquement montrée imperméable aux critiques extérieures, y compris celles émanant des Nations unies ou de l’Union africaine.
Plus de vingt ans après leur arrestation, le sort de ces prêtres rappelle la fermeture d’un pays où la religion, comme la politique, demeure sous contrôle étatique absolu. L’absence de perspectives de réforme alimente l’inquiétude quant à la pérennité de ces détentions arbitraires. Le contraste entre une constitution jamais appliquée et une répression constante illustre l’écart béant entre les promesses officielles et la réalité du régime érythréen.