« Depuis le mois de janvier 2023, nous dénombrons pas moins de 27 femmes et jeunes filles décédées du fait des violences perpétrées sur elles par des hommes, dans la plupart des cas un conjoint ou un parent », a déploré la ministre de la Promotion de la femme et de la famille (Minproff), Marie Thérèse Abena Ondoa, lors de la session de plaidoyer pour mettre fin à l’impunité des auteurs de violences basées sur le genre (VBG), organisée à Yaoundé à l’occasion de la Journée internationale de la famille ce lundi 15 mai.
Bien que les chiffres présentés par la Minproff soient alarmants, ils ne constituent que la pointe de l’iceberg. Selon les associations de défense des droits des femmes en effet, l’échelle réelle du féminicide est probablement beaucoup plus élevée, car trop de victimes ne sont toujours pas recensées faute d’informations suffisantes permettant d’identifier ces violences comme des meurtres liés au genre. Face à l’ampleur de ce fléau, ces associations plaident pour l’adoption d’une loi-cadre pour protéger davantage les victimes et améliorer la réponse pénale à ces violences.
« Il faut qu’il y ait une loi spécifique contre les violences faites aux femmes au Cameroun. C’est une promesse qui nous a été faite par le chef de l’État depuis 1997. Et je crois qu’il avait perçu la nécessité de cette loi. On donne toujours l’impression que notre cadre légal est suffisamment complet. Beaucoup de choses ont été faites, beaucoup de mécanismes ont été mis en place certes. Mais nous constatons que ce n’est pas assez. Il faut dissuader les auteurs de ces féminicides, surtout quand il s’agit des partenaires intimes ou des membres de la famille », a déclaré la présidente nationale de l’Association de lutte contre les violences faites aux femmes (ALVF), Élise Pierrette Mpoung Meno.
« Situation macabre »
Du côté des partenaires du Cameroun, on plaide également pour le renforcement du cadre juridique pour mettre fin aux VBG, en l’occurrence les féminicides qui en sont « la manifestation la plus brutale et la plus extrême », selon la représentante résidente d’ONU Femmes au Cameroun, Marie Pierre Raky Chaupin.
« Le Cameroun n’a pas encore un cadre juridique contre les VBG, mais il y a beaucoup de dispositions qui punissent les différentes formes de violences basées sur le genre. On a peut-être besoin de regarder le cadre juridique qui est déjà solide au Cameroun, mais pour le coordonner mieux avec une loi-cadre. C’est un plaidoyer que l’UNFPA a commencé à faire », affirme la représentante adjointe du Fonds des Nations unies pour la population (UNFPA), Noemie Dalmonte. Cet organisme onusien accompagne le gouvernement dans ses efforts de lutte contre les VBG, à travers notamment des actions et des activités de prévention de la violence et de réduction des risques.
Au Cameroun, il ne se passe plus une semaine sans qu’on évoque un féminicide, un crime rituel, un cas de viol ou toute autre forme de violence ayant entrainé la mort d’une femme ou d’une jeune fille. « La situation est macabre, au regard de l’actualité de ces derniers mois », reconnaît la Minproff, qui souhaite également voir une législation spécifique qui permettra de « réprimer sévèrement » les auteurs de VBG.
En attendant l’arrivée d’une telle loi, Marie Thérèse Abena Ondoa estime que le contexte actuel invite « à agir sans délai » en développant de nouvelles stratégies, à trouver des mesures innovantes et à mettre en œuvre des initiatives concrètes susceptibles de mettre fin aux VBG. Mais cela, dit-elle, demande l’implication de tous, y compris des communautés. La session de plaidoyer organisée ce jour visait, à cet effet, à mobiliser les principaux acteurs de la lutte contre les violences à l’égard des femmes et des filles et renverser leur tendance graduelle au Cameroun.