La célèbre prison politique du Tchad, tristement connue sous le nom de “la piscine” et associée au régime répressif d’Hissène Habré, a récemment été rasée. Ce lieu, situé dans l’enceinte de la présidence tchadienne et autrefois siège de la Direction de la documentation et de la sécurité (DDS), était marqué par des années de souffrances et d’atrocités.
La destruction de ce site historique intervient malgré les engagements pris par les autorités tchadiennes et la justice du pays. En effet, des promesses avaient été faites de transformer ce lieu en musée pour préserver la mémoire des victimes. Clément Abaïfouta, ancien président de l’association des victimes du régime d’Hissène Habré, avait même interpellé le président actuel, Mahamat Idriss Déby, pour stopper les travaux de démolition, rappelant les résolutions prises depuis la conférence nationale de 1993 jusqu’au dialogue de 2022.
L’histoire de la “piscine” remonte aux années 1980, lorsqu’elle fut convertie par la DDS en centre de détention et de torture. Sous le régime d’Hissène Habré, des milliers de personnes y ont été torturées et ont perdu la vie. Ce lieu est devenu un symbole des exactions commises durant cette période noire, qui a mené à la condamnation d’Hissène Habré pour crimes contre l’humanité lors d’un procès historique à Dakar en 2016.
Aujourd’hui, l’avenir de ce terrain reste incertain. Les autorités envisagent d’utiliser l’espace pour la construction d’un parking ou d’un nouveau bâtiment. Cette décision a été reçue avec douleur et indignation par les survivants et les familles des victimes. Ils voient dans cette démolition un effacement de leur histoire et un manquement aux promesses d’indemnisation, estimées à 82 millions de francs CFA, faites lors du procès d’Hissène Habré.
Le bulldozer qui a nivelé le site de la “piscine” a fait plus que détruire des structures en béton; il a emporté avec lui une part de la mémoire collective d’une nation. Ce geste symbolique marque une rupture avec un passé douloureux, mais soulève également des questions sur la préservation de la mémoire historique et la justice pour les victimes.
La décision de raser ce lieu historique pose un défi majeur : comment équilibrer le désir de tourner la page avec la nécessité de se souvenir et de rendre justice ? Cette situation souligne l’importance de conserver les sites historiques liés à des violations des droits humains, non seulement comme un rappel des erreurs passées, mais aussi comme un engagement envers un avenir plus juste et plus respectueux des droits de l’homme.