Le Burkina Faso vient de franchir un cap médical majeur avec la réalisation de sa première greffe de rein au Centre hospitalier universitaire de Tengandogo. L’intervention, annoncée mercredi 30 juillet par le ministre de la Santé Dr Robert Lucien Jean-Claude Kargougou, marque une “étape importante et historique” dans la prise en charge des pathologies rénales au pays des Hommes intègres. Cette transplantation, effectuée entre deux sœurs jumelles, ouvre officiellement l’ère de la chirurgie de transplantation d’organes dans ce pays sahélien de 23 millions d’habitants.
L’opération a consisté à remplacer le rein défaillant d’une patiente par un organe sain donné par sa sœur jumelle, une configuration idéale qui limite considérablement les risques de rejet. L’équipe médicale burkinabè du CHU de Tengandogo a bénéficié de l’expertise de spécialistes turcs pour mener à bien cette procédure chirurgicale complexe. Cette collaboration internationale illustre la montée en compétences des praticiens burkinabè et leur capacité à s’approprier des techniques de pointe, malgré les contraintes budgétaires et logistiques du système de santé national.
Cette première s’inscrit dans un contexte continental où les greffes d’organes demeurent exceptionnelles faute d’infrastructures adaptées et de ressources suffisantes. En Afrique de l’Ouest, seuls quelques pays comme le Sénégal et la Côte d’Ivoire avaient jusqu’ici développé des programmes de transplantation. Le Burkina Faso, confronté depuis plusieurs années à une recrudescence des maladies rénales chroniques liées notamment au diabète et à l’hypertension, cherchait des alternatives à l’évacuation sanitaire coûteuse de ses patients vers l’étranger. Cette réussite intervient également dans un climat politique particulier, alors que le pays traverse une période de transition sous direction militaire depuis 2022.
Cette première transplantation ouvre des perspectives thérapeutiques inédites pour les centaines de Burkinabè souffrant d’insuffisance rénale chronique terminale. Jusqu’à présent contraints à la dialyse à vie ou à des évacuations sanitaires ruineuses, ces patients peuvent désormais envisager une prise en charge locale. Le ministère de la Santé devra néanmoins structurer rapidement un programme national de transplantation, incluant la formation d’équipes spécialisées, l’acquisition d’équipements de pointe et la mise en place d’un réseau de donneurs. L’enjeu sera aussi de rendre cette procédure accessible financièrement aux populations les plus démunies.
Au-delà de l’exploit médical, cette réussite révèle la détermination du Burkina Faso à développer une médecine de haute technicité malgré les défis sécuritaires et économiques. Le CHU de Tengandogo, inauguré en 2010, s’impose progressivement comme un pôle d’excellence régional. Cette première greffe pourrait également servir de catalyseur pour attirer des investissements dans le secteur de la santé et renforcer la coopération médicale Sud-Sud, notamment avec la Turquie qui multiplie les partenariats sanitaires en Afrique. Pour les familles burkinabè, cette avancée représente un espoir concret de soins de qualité sans l’épreuve de l’exil médical.