Le Mali a annoncé son retrait de l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF), suivant ainsi l’exemple du Burkina Faso et du Niger, ses alliés au sein de l’Alliance des États du Sahel (AES). Cette décision a été rendue publique le 18 mars par le ministère malien des Affaires étrangères, qui a adressé une lettre à son homologue français. L’argument central avancé par Bamako repose sur l’application sélective des sanctions par l’OIF et son mépris supposé envers la souveraineté du Mali.
Dans le courrier, le ministère malien souligne que depuis le début de la transition, l’OIF s’est comportée de manière incompatible avec les principes fondamentaux de l’État malien. Le Mali dénonce une application « sélective » des sanctions à son encontre, faisant référence à la suspension de son statut au sein de l’organisation en août 2020, après le coup d’État qui a renversé le président Ibrahim Boubacar Keïta. Selon les autorités maliennes, l’OIF n’a pas soutenu le pays dans sa quête de stabilité, mais a plutôt exacerbé les tensions en imposant des mesures qui, selon elles, ont ignoré la volonté populaire exprimée par le peuple malien.
Ce retrait survient dans un contexte politique tendu, marqué par la transition au Mali après le coup d’État militaire de 2020. Depuis cette date, les relations entre le pays et les acteurs internationaux, notamment la France et l’OIF, se sont détériorées. Le Mali, dirigé par une junte militaire, a engagé une série de réformes visant à redéfinir son orientation politique et diplomatique, marquée par un rapprochement avec la Russie et une volonté de distancer le pays des anciennes puissances coloniales. L’Organisation internationale de la Francophonie, censée promouvoir les valeurs de la langue française et de la solidarité entre ses membres, s’est donc retrouvée au centre d’une critique croissante concernant son manque de soutien à cette nouvelle direction.
Le retrait du Mali de l’OIF, ainsi que celui du Burkina Faso et du Niger, soulève des questions sur l’avenir de la Francophonie en Afrique. Ces départs ne semblent pas être des incidents isolés, mais plutôt symptomatiques d’une remise en question plus large des relations post-coloniales dans la région. Si ces pays continuent de renforcer leur alliance sous l’Alliance des États du Sahel, ils pourraient se détourner d’autres institutions internationales jugées hostiles ou inadaptées à leurs priorités politiques. La souveraineté nationale et le rejet des sanctions externes deviendraient des axes centraux de leur diplomatie.
Ce retrait de la Francophonie pourrait aussi entraîner des changements notables dans la coopération régionale et internationale. L’OIF, qui rassemble 88 pays autour de la langue et de la culture française, pourrait voir son influence diminuer dans ces pays du Sahel. Les autorités maliennes ont fait savoir qu’elles privilégieraient désormais les partenariats avec des organisations qui respectent la souveraineté de leur pays. Toutefois, ce retrait pourrait aussi avoir des conséquences sur la coopération culturelle, économique et diplomatique avec d’autres membres francophones, dont les intérêts ne se recoupent pas toujours avec ceux du Mali.
Pour plusieurs observateurs, le retrait du Mali, accompagné de ceux du Burkina Faso et du Niger, marque la fin d’une époque pour la Francophonie, qui pourrait voir de nouveaux équilibres se dessiner sur le continent. Des analystes soulignent que ces pays souhaitent non seulement revendiquer leur autonomie face à l’influence de l’ancienne puissance coloniale, mais aussi montrer leur solidarité avec d’autres nations qui partagent une vision de souveraineté renforcée. Le professeur Amadou Traoré, spécialiste des relations internationales, explique que cette tendance pourrait trouver un écho plus large, notamment dans les pays africains où la question de la domination étrangère est de plus en plus débattue.
L’issue de ce retrait restera à surveiller, car elle pourrait avoir des conséquences à long terme sur les rapports entre l’Afrique et les institutions internationales qui se revendiquent d’une influence historique et culturelle partagée.