Un rapport publié le 26 août par Henley & Partners et New World Wealth révèle une hausse continue du nombre de grandes fortunes en Afrique. Le continent compte désormais 122 500 millionnaires, 348 centi-millionnaires et 25 milliardaires. Cette tendance devrait s’accélérer dans la prochaine décennie, avec une augmentation prévue de 65 % du nombre de millionnaires.
Cette évolution s’appuie sur une dynamique économique favorable. L’Afrique subsaharienne enregistre une croissance moyenne proche de 4 %, supérieure à celle de l’Europe. Selon Romain Ligault, conseiller en gestion de patrimoine à Henley & Partners, cette performance attire aussi bien les investisseurs africains, désireux de diversifier leurs portefeuilles, que des capitaux étrangers désormais convaincus du potentiel de long terme du continent.
Cette expansion tranche avec les années 1980 et 1990, marquées par des crises économiques, l’instabilité politique et le recul des investissements. La multiplication actuelle des grandes fortunes illustre à la fois la consolidation de certains secteurs — énergie, finance, immobilier, technologies — et la capacité de plusieurs économies africaines à résister aux turbulences mondiales.
L’Afrique du Sud concentre encore 34 % des millionnaires du continent, suivie par l’Égypte, le Maroc, le Nigeria et le Kenya. Johannesburg demeure la ville la plus riche, tandis que Le Cap se distingue comme un futur pôle immobilier, avec un prix moyen de 5 800 dollars le mètre carré. Dans les dix prochaines années, l’Île Maurice devrait également jouer un rôle central, après avoir connu une progression de 63 % du nombre de fortunés en une décennie.
Contrairement aux clichés de luxe ostentatoire, les grandes fortunes africaines se distinguent par des stratégies sophistiquées. Outre l’immobilier, elles privilégient le capital-investissement, le capital-risque et les produits financiers structurés. À l’image d’Aliko Dangote, les milliardaires africains adoptent des approches comparables aux grandes dynasties financières internationales.
Si les familles entrepreneuriales historiques conservent une place importante, une nouvelle génération émerge, notamment dans la technologie, la finance ou l’industrie minière. Ces profils diversifiés témoignent d’une transformation du paysage économique africain, où l’accumulation de richesses ne repose plus uniquement sur les filières traditionnelles mais aussi sur l’innovation et les services.
L’essor des fortunes africaines pourrait faire du continent un acteur majeur dans la création de richesses mondiales. Mais cette dynamique reste conditionnée à une meilleure gouvernance et à une redistribution plus équitable, faute de quoi les inégalités sociales risquent de s’accentuer. L’Afrique fait face à un paradoxe : une croissance rapide des grandes fortunes, alors qu’une large partie de sa population demeure confrontée à la pauvreté structurelle.