Le 28 mai dernier, la Côte d’Ivoire a franchi une étape majeure en introduisant la noix de cola à la Bourse régionale des valeurs mobilières (BRVM), marquant ainsi sa volonté d’en faire un produit stratégique à l’échelle continentale et mondiale. Ce geste s’inscrit dans un contexte de forte demande internationale, notamment dans l’agro-industrie, la cosmétique et la médecine traditionnelle, où les applications de la noix de cola se diversifient. Selon le cabinet Cognitive Market Research, le marché mondial atteindra 119 millions de dollars en 2025, avec une croissance annuelle moyenne estimée à 3,3 % jusqu’en 2033.
À l’échelle mondiale, cinq pays africains concentrent aujourd’hui l’essentiel de la production de noix de cola : le Nigeria, la Côte d’Ivoire, le Cameroun, le Ghana et la Sierra Leone. Le Nigeria, premier producteur mondial, a vu sa production passer de 139 000 tonnes en 1961 à plus de 183 000 tonnes en 2022, après des décennies d’irrégularité liées à des vergers vieillissants et aux attaques de ravageurs. La Côte d’Ivoire arrive en deuxième position avec 58 640 tonnes, malgré une baisse constante de sa production. Le Cameroun se maintient au troisième rang, suivi du Ghana et de la Sierra Leone.
Derrière ces chiffres, la production reste fragile et dépendante de pratiques agricoles souvent peu modernisées. En Côte d’Ivoire, par exemple, la filière reste largement artisanale, reposant sur la cueillette de noix dans des plantations mixtes, parfois spontanées. La pression parasitaire, la disparition des forêts et l’absence de vergers intensifs limitent la productivité. Au Nigeria également, les hausses de production récentes masquent des problèmes récurrents d’entretien des arbres et de régénération des plantations.
L’entrée en Bourse de la noix de cola pourrait marquer un tournant, à condition d’être suivie d’investissements dans la recherche agronomique, la transformation locale et la logistique commerciale. Le potentiel de valorisation du produit est réel, notamment dans les secteurs pharmaceutique et énergétique, où la caféine naturelle issue de la cola suscite un intérêt croissant. Mais sans une stratégie commune et une régulation régionale, les pays producteurs risquent de rester des fournisseurs de matière brute sans capturer la plus-value.
Le Nigeria, malgré sa position dominante, reste vulnérable à l’instabilité de ses rendements. La Côte d’Ivoire, deuxième producteur, mise sur une modernisation du secteur pour inverser la tendance baissière. Le Cameroun, relativement stable, pourrait devenir un acteur stratégique si des efforts sont faits pour structurer la chaîne de valeur. Le Ghana et la Sierra Leone, eux, évoluent à des échelles plus modestes, avec des croissances limitées mais constantes. L’ensemble de la région ouest-africaine dispose donc d’un levier économique à renforcer, à condition de mieux encadrer les filières nationales.