En pleine crise avec le M23 et le Rwanda, le président congolais a constaté dans une adresse à la Nation l’échec de la voie diplomatique et a affirmé que son pays était en guerre. Il a dénoncé « les velléités expansionnistes » du pouvoir rwandais et a appelé les jeunes Congolais à se constituer en « groupes de vigilance ».
Lors d’un discours à la télévision nationale, Félix Tshisekedi n’a pas mâché ses mots. Le chef de l’État a dénoncé « les velléités expansionnistes » du pouvoir rwandais qu’il qualifie « d’asservisseur qui aurait comme intérêt principal l’appropriation des minerais congolais ». Mais un concept en particulier, utilisé par Félix Tshisekedi dans son discours, a retenu l’attention. Le chef de l’État a appelé les jeunes à se constituer « en groupes de vigilance ».
La guerre qui nous est imposée par nos voisins exige de chacun de nous des sacrifices. La nation a besoin de l’engagement de toutes ses filles et de tous ses fils.
DISCOURS DE FELIX TSHISEKEDI, PRÉSIDENT CONGOLAIS
https://www.rfi.fr/fr/podcasts/la-parlotte-de-charlotte/20221104-les-je-sais-tout
Une formule sur laquelle est revenu au micro de RFI le ministre de la Communication et des médias, Patrick Muyaya, précisant qu’il ne s’agit pas de la constitution des groupes d’autodéfense. « Être vigilant, c’est être en mesure de dénoncer. On ne va pas résoudre un problème en créant d’autres. Il ne s’agit nullement de justice populaire ou de groupe d’autodéfense », a-t-il martelé, ajoutant que Félix Tshisekedi a fait la part de choses en précisant que les jeunes qui veulent se faire enrôler dans l’armée sont les bienvenus, qui plus est en cette période.
Même explication donnée dans l’entourage du président: « C’est un appel citoyen pour éviter l’infiltration parmi les civils ». « C’est une invitation à l’amélioration des rapports entre les services de sécurité et la population pour éviter toute surprise désagréable », a dit un de ses conseillers qui donne l’exemple des messages que distillent les autorités pendant les périodes d’attentat terroriste.
Un autre membre du cabinet du chef de l’État a aussi précisé que ces groupes de vigilance sont appelés à dénoncer également toutes les personnes qui seraient tentées de s’en prendre aux populations d’expression rwandophones.
« Un aveu de l’échec des services de sécurité »
Ce n’est pas la première fois que les relations civilo-militaires sont évoquées publiquement ces derniers jours. Mi-octobre, le général d’armée Célestin Mbala Munsense, chef d’état-major général sortant, avait recommandé à son successeur, le lieutenant-général Christian Tshiwewe Songhesha de capitaliser l’appui de plus en plus manifeste de la population envers les forces armées « face à l’agression extérieure ».
De son côté, le mouvement citoyen la Lutte pour le changement (Lucha) fustige des « incantations absurdes » du président Félix Tshisekedi. Alors que les combattants du M23 progressent, Stewart Muhindo, militant de la Lucha basé à Goma au Nord Kivu déplore l’absence de mesures fortes : « Tout ce qu’il a proposé, c’est cette vigilance dont il n’a pas défini les contours ».
Pour la Lucha, cet appel du président est d’abord vu comme « un aveu de l’échec des services de sécurité ». « Parce que si l’armée était aussi forte, si l’état de siège avait réussi, on n’en serait pas arrivé là », commente M. Muhindo. Et d’ajouter au sujet de cet appel à la mobilisation des jeunes : « C’est inquiétant, car il n’y a pas eu de précision autour des modalités pratiques de cette mobilisation. Les risques dans une région comme la nôtre, c’est qu’elle fasse des nids, qu’elle démultiplie le nombre de groupes armés locaux qui peuvent éventuellement être utiles pour freiner le M23, mais qui pourraient demeurer des sources d’insécurité pour les populations pendant les années à venir ».
Source: RFI