Le président ougandais Yoweri Museveni a officiellement pris, le 28 mai, la présidence du Mécanisme de suivi de l’accord-cadre pour la paix, la sécurité et la coopération dans la région des Grands Lacs. Il succède pour deux ans à son homologue burundais Évariste Ndayishimiye. Lors de cette cérémonie à haut enjeu, Museveni a défendu une approche résolument régionale pour résoudre la crise persistante en République démocratique du Congo, critiquant fermement les tentatives de règlement menées depuis l’extérieur.
S’exprimant sans détour, le chef d’État ougandais a fustigé les dirigeants qui se tournent vers les puissances étrangères pour gérer les crises internes. Bien que non nommé, le président congolais Félix Tshisekedi est clairement visé. Museveni a dénoncé un schéma ancien : « Tant que j’ai un soutien extérieur, je ne me soucie pas des questions internes », a-t-il résumé, avant de rappeler que cette logique a historiquement conduit à l’instabilité.
Le président ougandais a convoqué plusieurs épisodes marquants de l’histoire congolaise pour appuyer son argumentaire. Depuis l’assassinat de Patrice Lumumba, jusqu’à la gouvernance de Mobutu, soutenu militairement par la France et le Maroc, Museveni dénonce une constante : le manque d’appropriation régionale des solutions. Il cite aussi le Rwanda d’Habyarimana et le refus d’accueillir les réfugiés tutsis, décision aux conséquences dramatiques.
Pour Museveni, la situation actuelle en RDC ne peut être résolue sans une véritable volonté politique des pays des Grands Lacs. Il insiste sur la connaissance fine que les États voisins ont du contexte local – contrairement aux acteurs extérieurs – et appelle à une coopération active entre le Rwanda, le Burundi, l’Ouganda, la Tanzanie, le Kenya et l’Est du Congo. « Nous ne sommes pas des étrangers ici », martèle-t-il.
I welcome the Heads of State and Delegations who are here to attend the Twelfth High-Level Meeting of the Regional Oversight Mechanism of the Peace, Security, and Cooperation Framework for the Democratic Republic of Congo and the Region. pic.twitter.com/1k3vXdA31e
— Yoweri K Museveni (@KagutaMuseveni) May 28, 2025
Au-delà du discours sur la souveraineté régionale, Museveni semble vouloir repositionner l’Ouganda comme un acteur clé des dynamiques de paix dans la région. Cette prise de parole coïncide avec une intensification des tensions entre Kinshasa et Kigali, ainsi qu’un regain d’activité des groupes armés dans l’Est congolais. Le timing de sa déclaration est donc loin d’être anodin.
Enfin, Museveni adresse une mise en garde implicite aux partenaires occidentaux qu’il accuse d’encourager, souvent involontairement, les acteurs déstabilisateurs. Son discours relance le débat sur le rôle des acteurs internationaux dans la région : sont-ils des médiateurs crédibles ou des amplificateurs de conflits ? Pour Museveni, la réponse est claire : la paix durable ne viendra que si les pays concernés en prennent l’initiative eux-mêmes.