En visite d’État à Niamey, le président de transition tchadien Mahamat Idriss Déby Itno a exprimé, le 6 août, un soutien appuyé aux autorités militaires nigériennes. À travers un discours centré sur la souveraineté et l’unité du continent, le dirigeant tchadien a salué la résilience du peuple nigérien face aux pressions extérieures, tout en promettant un accompagnement ferme du Tchad dans cette phase de transition politique.
S’exprimant aux côtés du général Abdourahamane Tiani, chef de l’État nigérien, Mahamat Déby a rejeté toute lecture diplomatique superficielle de sa visite. « Ce n’est pas une simple posture, mais une conviction profonde », a-t-il martelé, en référence à l’alignement du Tchad avec le Niger. Il a également souligné la portée symbolique de l’exemption de visas entre les deux pays, mesure présentée comme un geste concret de rapprochement entre deux peuples liés par l’histoire, la géographie et les défis communs.
Le cadre de coopération entre les deux États ne date pas d’hier. L’accord de 1961 et les travaux de la commission mixte de Niamey, relancés en 2013, ont posé les bases d’un partenariat couvrant les domaines de la sécurité, de la mobilité, du commerce et de l’environnement. Cette visite intervient toutefois dans un contexte géopolitique bouleversé : le Niger, dirigé par des militaires depuis le coup d’État de 2023, est en rupture avec les partenaires occidentaux et les institutions régionales comme la CEDEAO. Le Tchad, en maintenant des canaux ouverts avec Niamey, se positionne comme un acteur de stabilité dans le Sahel.
Le soutien affiché par Déby ne s’est pas limité aux déclarations symboliques. Un communiqué conjoint a été adopté à l’issue de cette première journée, officialisant plusieurs engagements : renforcement de la coopération sécuritaire autour du bassin du Lac Tchad, relance de projets économiques communs – dont un pipeline, un partenariat énergétique autour du projet Salkadamna, et l’approvisionnement en gasoil. L’interconnexion des réseaux de fibre optique a également été annoncée, tout comme la réactivation de la commission mixte, qui se réunira prochainement à N’Djaména.
Le général Tiani a qualifié cette visite de « fraternelle et stratégique ». En retour, Déby a salué « la maturité politique » du peuple nigérien, insistant sur sa capacité à faire face à la crise avec calme et détermination. En filigrane, c’est un appel à rompre avec les influences extérieures, que Déby a résumé en ces termes : « La souveraineté ne se décrète pas, elle se construit, se défend et s’assume. » Ce message trouve un écho particulier dans un Sahel en pleine reconfiguration, entre pressions sécuritaires, retrait des partenaires occidentaux et montée en puissance des initiatives souverainistes.
En appuyant le Niger, Mahamat Idriss Déby poursuit une stratégie à double niveau : affirmer l’indépendance diplomatique du Tchad et resserrer les liens avec les pays membres de l’Alliance des États du Sahel (AES). Ce rapprochement s’inscrit dans une dynamique de redéfinition des alliances régionales, dans laquelle les pays sahéliens cherchent à bâtir des partenariats sur la base d’intérêts communs et d’une volonté politique partagée, plutôt qu’à travers des modèles imposés de l’extérieur.