L’Autorité nationale des élections (ANE) de Centrafrique a publié les listes électorales provisoires à cinq mois des élections générales prévues en décembre 2025. Ces listes, affichées dans les centres de vote de Bangui et de certaines villes de province, recensent environ 2 millions d’électeurs sur une population de 6 millions d’habitants. Cette publication marque une étape cruciale du processus électoral, mais révèle déjà des dysfonctionnements qui suscitent des interrogations sur la crédibilité du scrutin à venir.
L’affichage des listes dans les centres comme le lycée technique de Bangui permet aux citoyens de vérifier leur inscription. Si certains électeurs, à l’image de Jean-Marie, se félicitent de la qualité du travail réalisé avec des photos claires et des informations correctement enregistrées, d’autres pointent des défaillances préoccupantes. Bruno témoigne ainsi d’erreurs orthographiques sur son nom, d’une photo trop sombre et de la radiation inexpliquée du nom de sa mère des listes. Ces irrégularités, constatées dans “presque tous les centres de la capitale” selon les témoignages recueillis, jettent une ombre sur la fiabilité du processus.
Les opérations d’enrôlement, lancées en décembre 2024, ont accusé un retard significatif en raison de multiples obstacles. Les problèmes techniques, financiers et sécuritaires ont entravé le bon déroulement de cette phase préparatoire essentielle. Cette situation reflète les défis structurels auxquels fait face la Centrafrique dans l’organisation de ses processus démocratiques, dans un pays encore marqué par l’instabilité politique et les contraintes budgétaires. L’ANE se trouve ainsi sous pression pour rattraper le temps perdu tout en garantissant la qualité du fichier électoral.
Les électeurs disposent d’une fenêtre limitée de dix jours maximum pour contester les erreurs constatées auprès des centres de l’ANE. Un agent de l’institution, sous couvert d’anonymat, exhorte les citoyens à “recourir aux voies légales” pour signaler les problèmes identifiés. Après cette phase de vérification, l’ANE procédera à la confection des cartes d’électeurs avant de convoquer officiellement le corps électoral. Le calendrier serré laisse peu de marge de manœuvre pour corriger les dysfonctionnements sans compromettre l’organisation des élections de décembre.
Cette publication des listes électorales intervient dans un contexte où la légitimité des institutions centrafricaines reste fragile. La capacité de l’ANE à rectifier rapidement les erreurs signalées constituera un test de crédibilité crucial pour l’organe électoral. Les irrégularités constatées, bien que ponctuelles selon les autorités, risquent d’alimenter les contestations de l’opposition et de la société civile si elles ne sont pas traitées avec la rigueur nécessaire.
L’enjeu dépasse la simple correction technique des listes. Il s’agit de restaurer la confiance des citoyens dans le processus électoral centrafricain, condition sine qua non pour des élections apaisées et légitimes. La transparence dans le traitement des réclamations et la capacité de l’ANE à communiquer efficacement sur les améliorations apportées détermineront largement l’acceptation des résultats par l’ensemble des acteurs politiques et de la population.