La République démocratique du Congo a formellement condamné ce qu’elle qualifie d'”agression rwandaise”, suite à la prise stratégique de la ville d’Uvira, au Sud-Kivu, par les rebelles du Mouvement du 23 mars (M23). Dans un communiqué officiel, le gouvernement congolais alerte sur une “grave détérioration de la situation sécuritaire” qui menace directement les fragiles processus de paix en cours.
Les accusations de Kinshasa sont précises et graves. Les autorités congolaises affirment que l’offensive rebelle, caractérisée par l’emploi de drones kamikazes, est directement soutenue par les forces armées rwandaises. Cette assistance militaire présumée aurait permis au M23 de remporter des avancées significatives, causant selon le communiqué des pertes civiles et des dégâts matériels considérables. L’utilisation de cette technologie marque une escalade inquiétante dans les moyens déployés par les insurgés.
Cette nouvelle crise s’inscrit dans un conflit récurrent qui ravage l’est de la RDC depuis près de trois décennies. Le M23, un groupe rebelle à dominante tutsi, avait été militairement défait en 2013 avant de resurgir fin 2021, reprochant à Kinshasa de ne pas avoir honoré des accords de démobilisation. Depuis, Kinshasa et une majorité d’experts onusiens accusent systématiquement le Rwanda de soutenir militairement la rébellion, une allégation que Kigali rejette catégoriquement, rétorquant que la RDC collabore avec des groupes armés hostiles au Rwanda.
Les perspectives immédiates sont sombres et pourraient redéfinir les équilibres régionaux. La chute d’Uvira, ville clé sur les rives du lac Tanganyika, ouvre potentiellement un nouveau front au Sud-Kivu et isole davantage Kinshasa dans l’est du pays. La ministre congolaise des Affaires étrangères, Thérèse Kayikwamba Wagner, a explicitement appelé les États-Unis à étendre les sanctions ciblées contre le Rwanda. Cet appel vise à faire pression sur Kigali et, selon les termes du communiqué, à “restaurer la crédibilité” des efforts de médiation américains, parrainés à l’origine par l’ancien président Donald Trump.
La réponse rwandaise ne s’est pas fait attendre. Le gouvernement de Paul Kagame a démenti toute implication et a contre-attaqué en accusant la RDC et le Burundi, son allié dans la région, d’avoir relancé les hostilités. Ce dialogue de sourds perpétue un cycle d’accusations qui paralyse toute résolution durable du conflit. La communauté internationale, notamment les États-Unis et l’Union africaine, se retrouve une fois de plus dans la position délicate d’arbitre face à des récits diamétralement opposés et à une escalade sur le terrain.
Analystes et observateurs sur place craignent que cette avancée du M23 ne déclenche de nouveaux déplacements massifs de populations dans une région déjà saturée de camps de déplacés. Elle risque également d’exacerber les tensions intercommunautaires et de provoquer des représailles contre des civils. La situation met en lumière l’échec cuisant des mécanismes de sécurité régionaux, comme la force de l’East African Community, qui s’est retirée récemment, et la fragilité extrême des accords politiques censés apaiser la région. L’est de la RDC semble s’enfoncer dans une nouvelle phase de violence, avec des conséquences humanitaires potentiellement catastrophiques.



