Quelques jours après la signature d’un accord de paix entre la RDC et le Rwanda à Washington, le mouvement rebelle AFC/M23 accuse le gouvernement congolais d’avoir massivement redéployé ses troupes dans l’Est du pays. Selon lui, ce renforcement militaire constitue une provocation qui menace la fragile dynamique diplomatique en cours.
Dans un communiqué diffusé samedi, le porte-parole politique de l’AFC/M23, Laurence Kanyuka, alerte la communauté nationale et internationale sur le « déploiement massif et provocateur » de forces armées congolaises dans les zones de front. L’AFC/M23 dénonce la participation de la Force de défense nationale du Burundi, alliée à Kinshasa, et affirme que des armes lourdes ont été dirigées vers des zones fortement peuplées. Le mouvement qualifie cette attitude de « criminellement irresponsable », estimant qu’elle « frise le crime contre l’humanité ».
Cette montée de tension survient alors que, le 27 juin, un accord de paix a été conclu à Washington entre la RDC et le Rwanda sous l’égide des États-Unis. Le texte prévoit notamment un arrêt des hostilités, la fin du soutien aux groupes armés non étatiques, la mise en œuvre du plan de neutralisation des FDLR, et la création d’un mécanisme conjoint de coordination sécuritaire (JSCM). L’accord engage aussi les deux États à coopérer sur les aspects humanitaires, économiques et de dialogue avec le M23. Le timing de ce déploiement militaire, selon l’AFC/M23, remet en cause la sincérité des engagements de Kinshasa.
Tout en réaffirmant sa volonté de régler le conflit par des moyens politiques, l’AFC/M23 accuse Kinshasa de ne pas respecter les mesures de confiance négociées, notamment lors des pourparlers de Doha. Le mouvement affirme avoir rempli ses propres engagements et juge la posture du gouvernement congolais comme une « duplicité inadmissible ». Selon lui, l’approche de Kinshasa ne vise pas à résoudre le conflit, mais à renforcer ses positions par la force.
En conclusion de son communiqué, le mouvement rebelle annonce qu’il se réserve le droit de protéger les populations civiles et de défendre ses positions « face à cette agression militaire criminelle ». Cette déclaration laisse entrevoir un risque réel de reprise des affrontements, en dépit des engagements pris à Washington. D’autant que les tensions persistent sur le terrain : les FARDC ont récemment signalé le survol illégal du territoire congolais par un aéronef non identifié, un incident qui alimente les suspicions.
L’épisode souligne une nouvelle fois le décalage entre les engagements signés dans les capitales occidentales et la réalité sur le terrain. L’accord de Washington repose sur une coopération régionale et internationale, mais sans mécanisme de vérification robuste, il risque de rester lettre morte. Tant que les causes profondes du conflit – accès aux ressources, enjeux identitaires, rôle des puissances régionales – ne seront pas abordées de front, chaque mouvement militaire ou diplomatique sera perçu comme une manœuvre de diversion. Le silence du Rwanda, pourtant signataire de l’accord, interroge également.