L’Assemblée nationale de la Centrafrique a adopté à l’unanimité, le lundi 29 mai, le projet de loi sur la « tokenisation » des ressources naturelles. Cette mesure vise à permettre la vente en ligne de titres numériques de propriété foncière, dans le but de valoriser les richesses du pays et de faciliter leur exploitation, tout en luttant contre la corruption. Le gouvernement espère attirer des investisseurs en utilisant la technologie de la « blockchain » pour garantir la propriété des ressources forestières, minières, agricoles et pétrolières, jusqu’à présent largement inexploitées.
Les autorités considèrent que la « tokenisation » constitue une étape logique après l’adoption de la loi sur les cryptomonnaies en avril 2022, et qu’elle permettra de dynamiser l’utilisation du Bitcoin et du sangocoin, dont le lancement a été un échec. Grâce à la plateforme Sango, il sera possible de créer en ligne des sociétés de droit centrafricain capables d’acquérir des titres numériques de propriété foncière. Le ministre des Mines, Rufin Benam Beltoungou, affirme que ce texte est conforme aux règles de la Cémac et qu’il constituera une « expérience pionnière » susceptible d’influencer les décisions des pays voisins.
Cependant, les députés d’opposition membres de la commission mixte sur le projet ont boycotté la séance plénière. Anicet-Georges Dologuélé, Martin Ziguélé et Rachel Ngakola dénoncent le fait que le texte a été examiné en moins d’une semaine et voté le dernier jour de la session ordinaire de l’assemblée. Ils estiment que les députés ont été contraints de voter un texte qu’ils n’ont pas eu le temps de lire, alors même qu’il s’agit d’une loi qui ambitionne de révolutionner complètement l’organisation économique du pays. Selon eux, le gouvernement risque de brader les ressources naturelles à des acteurs peu scrupuleux, au lieu de renforcer les moyens de contrôle pour une meilleure gestion des revenus issus de ces secteurs économiques.
La Centrafrique, l’un des pays les plus pauvres du monde, connaît une économie dévastée par des années de guerre civile. Selon les Nations Unies, seul un habitant sur dix a accès à l’électricité et à Internet. Le pays dépend largement de l’aide internationale pour sa survie. L’adoption de la « tokenisation » des ressources naturelles avait déjà suscité des commentaires moqueurs, mais aussi des inquiétudes de la part des organisations régionales, africaines et internationales. Cette mesure représente à la fois des opportunités économiques et des défis à relever